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Dossier

Cancer du sein

Des recos sur l’ostéoporose post-chimio

Publié le 22/01/2016
Des recos sur l’ostéoporose post-chimio


Lors du dernier congrès de la Société Française de Rhumatologie, plusieurs communications ont fait le lien entre rhumatologie et cancérologie. Avec notamment la présentation de nouvelles recommandations sur l’ostéoporose post-chimio dans le cancer du sein ou encore le bilan à 15 ans du risque cancérogène des anti-TNF.

Les traitements du cancer du sein ont un retentissement important sur la densité minérale osseuse (DMO), en majorant la baisse des œstrogènes chez les femmes ménopausées et en induisant une aménorrhée ou une ménopause précoce chez celles qui ne l'étaient pas. Plus de 48 000 nouvelles patientes sont concernées chaque année, en France. Lors du congrès de la SFR, le Dr Cyrille Confavreux (CHU de Lyon) a présenté les toutes récentes recommandations de la société savante pour la prévention de ces ostéoporoses induites.

L'hormonothérapie repose sur les inhibiteurs de l'aromatase chez les femmes ménopausées et sur le tamoxifène ou, plus rarement, sur une combinaison analogue de la LH-RH + tamoxifène ou analogue de la LH-RH +inhibiteur de l'aromatase chez les femmes non ménopausées. « La combinaison d’analogues de la LH-RH et d’inhibiteurs de l’aromatase  est, clairement,  la plus toxique pour l’os », indique le Dr Confavreux.

Les résultats à 5 ans de l'étude Atac indiquent une perte osseuse majeure au cours des deux premières années sous anti-aromatase. Quand l'anti-aromatase est arrêtée, la perte de DMO apparaît partiellement réversible, avec une meilleure récupération au niveau lombaire qu'à la hanche. Les analogues de la LH-RH provoquent une aménorrhée constante, réversible en un an dans trois quarts des cas. Ils entraînent une baisse importante de la DMO, notamment au niveau du rachis lombaire (-5 à 10 % en moyenne à deux ans), avec une récupération partielle à l'arrêt du traitement.
Le tamoxifène n'a pas d'impact chez les femmes ménopausées, mais est associé à une baisse de la DMO de 1 à 2 % par an vs placebo chez les femmes non ménopausées.

Les biphosphonates oraux efficaces


De nombreuses études démontrent l'efficacité des biphosphonates oraux pour prévenir la perte osseuse sous inhibiteurs de l'aromatase, aussi bien au niveau de la hanche que du rachis lombaire. Les résultats à 5 ans de l'étude Zo-fast montrent un bénéfice important du traitement immédiat par zolédronate IV, par rapport au traitement retardé, sur la DMO (+ 4,3 % contre -5,4 %). Cependant même le traitement secondaire a un effet favorable. Un gain densitométrique a été également observé sous dénosumab dans l'étude ABCSG-18, de même qu'un effet de prévention des fractures dès la première année. Les biphosphonates préviennent également la perte osseuse induite par la chimiothérapie.

Sur la base de ces données, la SFR recommande une évaluation du risque fracturaire pour toute femme ménopausée débutant un traitement par inhibiteur de l'aromatase, ainsi que pour les femmes non ménopausées gardant une aménorrhée un an après une chimiothérapie ou recevant un analogue de la LH-RH. Cette évaluation doit comprendre la mesure de la taille, une ostéodensitométrie et la correction des facteurs de risque de fragilité osseuse et de chutes.

Un traitement pharmacologique est recommandé en cas d'antécédent de fracture à basse énergie. « En l'absence d'antécédents, c'est le T-score qui guide la conduite thérapeutique », précise le Dr Confavreux. Les recos abaissent le seuil de traitement pharmacologique à un T-score < ou égal à -2,5 (contre -3 dans l'ostéoporose commune). Si le T-score est entre -1 et -2,5 le score de risque fracturaire FRAX doit être évalué. S'il est supérieur à celui des femmes de même statut ménopausique et de même âge, les patientes doivent être traitées. Dans le cas contraire, une nouvelle ostéodensitométrie doit être réalisée après 18 ou 24 mois, car la perte osseuse est très importante au cours des deux premières années. Enfin, si le T-score est > -1, la prévention des facteurs de risque suffit, mais il faut refaire une densitométrie après 3 à 5 ans.

Pour le traitement pharmacologique, les recommandations  privilégient les biphosphonates : risédronate (35 mg/semaine pendant 5 ans) ou acide zolédronique (5 mg/an IV pendant 3 ans). Le dénosumab n'est pas préconisé en première intention. Le traitement peut être arrêté après une première séquence thérapeutique si le T-score est au minimum stable et s'il n'y a pas eu de fracture ostéoporotique, ni de nouveaux facteurs de risque.

Dr Isabelle Leroy