La fibrillation auriculaire comme marqueur de risque de décès et d’événements cardiovasculaires chez les femmes comparativement aux hommes : revue systématique des études de cohorte et méta-analyse.
Emdin CA, Wong CX, Hsiao AJ, et al. Atrial fibrillation as risk factor for cardiovascular disease and death in women compared with men : systematic review and meta-analysis of cohort studies BMJ 2016;352:h7013. http://dx.doi.org/10.1136/bmj.h7013.
CONTEXTE
La prévalence de la fibrillation auriculaire (FA) augmente parallèlement au vieillissement de la population des pays développés (1). Ajusté sur l’âge, la FA multiplie le risque de décès par 1,7 (IC95 % = 1,4-2,1) (2). S’il est bien connu que la FA augmente le risque d'AVC et de décès chez les hommes et chez les femmes, la littérature suggérant que ce risque était plus important chez les femmes que chez les hommes était contradictoire (3,4).
OBJECTIF
Déterminer si le risque de décès et d’événements CV était plus élevé chez les femmes que chez les hommes atteints de FA.
MÉTHODE
Méta-analyse des études de cohortes publiées entre 1966 et 2015, identifiées par une recherche systématique dans Medline, Embase et les références des publications répertoriées. Pour être intégrées dans la méta-analyse, les cohortes devaient concerner au moins 50 sujets atteints et 50 indemnes de FA suivis pendant au moins 6 mois et rapportant une corrélation statistique, ajustée sur l’âge et les antécédents CV, entre le genre et les événements suivants : mortalité totale et CV, AVC fatal et non fatal, insuffisance cardiaque, artérite des membres inférieurs et insuffisance rénale chronique.
L’analyse a calculé le risque relatif (RR) des événements cliniques listés ci dessus entre les sujets atteints de FA et ceux indemnes de FA pour chaque genre, puis le ratio entre les genres. L’analyse statistique a été faite par la variance inverse des RR observés pour chaque genre et leur ratio, ajustée sur la puissance de chacune d’entre elles. Des analyses de sensibilité par méta-régression ont été conduites pour s’assurer que les résultats n’étaient pas différents selon les caractéristiques des études et de leurs méthodes. Les résultats sont présentés en RR pour chaque genre (avec son IC95 %) puis en ratio entre les genres (avec son IC95 %).
RÉSULTATS
Sur 3 635 études de cohorte identifiées, 30 regroupant 4 371 714 patients dont 66 511 atteints de FA ont été inclus dans la méta-analyse.
- Pour la mortalité totale, le RR chez les femmes était de 1,69 (IC95 % = 1,50-1,90) vs 1,47 (IC95 % = 1,32-1,65) chez les hommes, soit un sur-risque de 1,12 (IC95 % = 1,07-1,17).
- Pour la mortalité CV, le RR chez les femmes était de 3,37 (IC95 % = 1,72-6,60) vs 1,57 (IC95 % = 0,94-2,62) chez les hommes, soit un sur-risque de 1,93 (IC95 % = 1,44-2,60).
- Pour les AVC, le RR était de 4,05 (IC95 % = 2,52-6,50) chez les femmes vs 1,77 (IC95 % = 1,40-2,24) chez les hommes, soit un sur-risque de 1,99 (IC95 % = 1,46-2,71).
- Pour l’insuffisance cardiaque, le sur-risque des femmes était de 1,16 (IC95 % = 1,07-1,27). Enfin, en considérant la morbimortalité globale, le sur-risque des femmes vs les hommes était de 1,80 (IC95 % = 1,10-2,60).
COMMENTAIRES
Ce travail très original a inclus plus de 4 millions de sujets dont 66 000 atteints de FA. Le nombre d’événements cliniques observés dans ces cohortes était d’environ 140 000. Il confirme que la FA est un marqueur de risque de décès et d’événements CV graves quel que soit le genre et que les femmes sont nettement plus à risque que les hommes (presque le double). Les auteurs ne proposent pas d’explications rationnelles à cette différence entre les genres, tout en suggérant un éventuel « sous-traitement » des femmes.
Cette méta-analyse pallie le manque de puissance des études de cohorte précédentes, soit parce que les effectifs étaient insuffisants, soit parce que la durée de suivi était trop courte, soit parce que les événements étaient trop rares, soit les trois. Ses principales faiblesses sont la non-inclusion des études non publiées car négatives et l’impossibilité d’ajuster l’analyse statistique sur tous les facteurs de confusion.
En pratique, les traitements de la FA (anticoagulants, contrôle de la fréquence cardiaque par les bêtabloquants, l’amiodarone ou certains inhibiteurs calciques) sont très efficaces pour réduire la survenue de décès et d’événements CV graves. Cette méta-analyse incite à davantage optimiser l’anticoagulation et l’observance chez les femmes ainsi que les traitements des autres facteurs de risque cardiovasculaire si nécessaire.
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