LE QUOTIDIEN : Suppression de la PACES et des ECN, fin de l'exercice isolé... Quel jugement portez-vous sur les réformes annoncées par Agnès Buzyn ?
LUCIE GARCIN : Elles vont dans le bon sens. Sur la réforme des études, il y a une vraie prise de conscience et une volonté d'améliorer la formation initiale. On sait que ces études sont très compliquées, stressantes. Sans changement, les étudiants resteraient dans ce carcan qui conduit à une grande détresse.
Sur l'exercice, on sent la volonté de valoriser les soins primaires, on s'oriente aussi vers une meilleure organisation territoriale. Toutefois, il faut rester vigilant sur la traduction de ces annonces. Par exemple, le risque avec la multiplication des CPTS [communautés professionnelles territoriales de santé, NDLR] est de créer des coquilles vides qui ne conviennent pas aux professionnels de santé.
Lors de la dernière séance de négociation sur les assistants médicaux, les syndicats seniors ont claqué la porte, critiquant la vision « productiviste » de la CNAM. L'ISNAR-IMG se range-t-elle derrière ses aînés ?
Je comprends la réaction de nos aînés et la nécessité d'avoir des garanties pour le déploiement de cette réforme des assistants. Calculer à la seconde près le temps gagné par le médecin n'a aucun sens ! Il faut réintroduire les notion de qualité de vie au travail, de qualité et de pertinence des soins. Si on entre dans une vision productiviste, on ratera ce virage. Nous voulons que ces négociations aboutissent car elles portent de l'espoir pour la médecine générale, les patients et l'accès aux soins. Il faudra aussi réussir à dégager du temps médical grâce au partage de compétences.
Le rapport Aubert propose la réduction du paiement à l'acte au profit de forfaits et de paiements à la qualité. L'ISNAR-IMG partage-t-elle cette vision ?
Nous soutenons la diversification des modes de rémunération. Les futurs médecins souhaitent privilégier les paiements forfaitaires en complément du paiement à l'acte. Mais en corollaire, nous souhaitons une revalorisation des actes, notamment ceux liés à la prévention. Le rapport Aubert va dans le bon sens. Le patient devra être pris en charge dans sa globalité surtout s'il est polypathologique. Il ne faudrait pas créer des filières liées à telle ou telle maladie d'organe qui brouilleraient la vision globale de la polypathologie d'un patient.
L'ISNAR-IMG a conduit une enquête sur les conditions de travail des internes en médecine générale. Quelle est la situation ?
L'enquête porte sur les conditions de travail en stage, le temps de travail, la seniorisation et le repos de garde. 1 000 internes y ont participé et les résultats sont alarmants ! En 2016 déjà, l'enquête sur la santé mentale, effectuée avec les autres syndicats de jeunes, dressait un constat très inquiétant : 66 % des internes souffraient d'anxiété. Les taux de dépression et d'idées suicidaires étaient importants chez les jeunes, de deux à cinq fois supérieurs à la population générale. Et les conditions de travail ont été mises en avant comme facteur aggravant pour les risques psychosociaux des internes.
Avec cette nouvelle enquête, nous voulons faire un rappel à l'ordre sur le temps de travail des internes. La durée légale est de 48 heures par semaine maximum. On n'y est pas ! Nous exprimerons à Agnès Buzyn, qui a confirmé sa venue au congrès, nos attentes au sujet des risques psychosociaux.
Il faut qu'une prise de conscience s'opère. Un an après l'annonce du plan sur la qualité de vie des étudiants en santé, il ne s'est pas passé grand-chose. Le centre national d'appui censé coordonner les actions n'a même pas été mis en place ! On veut que ça avance vraiment. Nous souhaitons aussi que des sanctions – comme le retrait d'agrément dans certains stages – soient enfin appliquées.
L'ISNAR-IMG s'est prononcée en faveur de l'allongement à quatre ans du DES de médecine générale. Où en êtes-vous dans les discussions ?
Ça n'a pas avancé. Nous y sommes toujours favorables mais l'allongement du DES ne peut s'envisager que si le nombre d'enseignants et de maîtres de stage des universités en médecine générale augmente. Il faut également que le nombre de stages en ambulatoire de qualité soit au rendez-vous.
Ces conditions doivent s'accompagner d'une réflexion sur la maquette. Il ne faut pas simplement ajouter une 4e année bricolée. Il faut un parcours personnalisé qui colle au projet professionnel de l'interne avec aussi un statut adapté à l'ambulatoire. Une fois ces objectifs atteints, nous envisagerons réellement une 4e année !
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