ILS S’APPELLENT Valode et Pistre, AIA, Oger International et Groupe-6. Ces noms, s’ils ne disent rien à la plupart des professionnels de santé, appartiennent à des cabinets d’architectes qui se creusent la tête pour rendre l’environnement du patient plus agréable, celui du praticien plus efficient. Parmi d’autres, ces architectes érigent l’hôpital de demain selon un cahier des charges de plus en plus encadré. « L’architecte, l’artiste, dirons-nous, doit s’adapter aux contraintes propres à l’hôpital moderne, explique Monique Ricomes, secrétaire générale de l’AP-HP (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris) : essor des plateaux techniques, ouverture sur la ville, ambulatoire, interdisciplinarité, développement durable, bien-être et sécurité des patients ».
« L’architecture ne guérit pas mais permet de mieux soigner ».
S’il ne tient pas le fusain, le médecin est celui qui en guide le trait. « Le projet architectural doit coïncider avec le projet d’établissement, et non l’inverse », précise Lila Pooler, architecte chez Oger International. Une vision partagée par Jérôme Bataille, du cabinet AIA, qui défend l’idée que « l’architecture ne guérit pas mais permet de soigner mieux ».
C’est le cas de l’institut Gustave Roussy (Villejuif), premier centre européen de lutte contre le cancer. Malgré plusieurs réaménagements successifs menés ces trente dernières années, l’établissement n’a jamais réussi à perdre son image austère et « inhospitalière » due aux matériaux utilisés (verre et métal) et à la verticalité écrasante du bâtiment principal. « Notre conversation avec les médecins nous a convaincus de réorganiser les services à l’horizontale autour d’un plateau de consultation central, détaille Jérôme Bataille, en charge d’un grand chantier de modernisation, livré il y a cinq ans. Avant, un bilan diagnostic pouvait prendre neuf jours, le temps nécessaire au patient pour se rendre dans les différents services (radiologie, laboratoire d’analyses, etc.). Désormais, avec un parcours de soin coordonné facilité par une architecture adéquate, tout est fait en un jour ».
À Clermont-Ferrand, le CHU Estaing a été élaboré avec la même ambition d’horizontalité. « Afin de conserver une échelle humaine, nous avons fractionné le volume en pavillons desservis par une rue centrale, propice à l’échange et bordée de petits commerces, comme dans la "vraie" vie », explique Alain Eyraud, président du cabinet Groupe-6. Rappelant les volcans d’Auvergne, le basalte a aussi été privilégié.
En Chine, les angles synonymes de ruptures.
Autre difficulté pour l’architecte hospitalier : il n’y a pas de canevas, de maquette type. La tendance est au sur-mesure. Chaque nouveau projet prend en compte l’environnement sociétal dans lequel s’inscrit l’offre de soins. Cette liberté permet aux maçons de la santé de libérer leur esprit créatif, en suggérant entre les murs une culture locale, un esprit propre au lieu, dans le respect du cahier des charges. « Aucune ligne brute ne nous a été autorisée, raconte Jean Pistre, architecture du futur hôpital de Shenzhen, mégalopole chinoise de dix millions d’âmes. Dans l’art taoïste feng shui, les angles sont synonymes de ruptures et, à l’hôpital, de « coupures » de vies ! L’établissement sera tout en cercles et courbes ». À l’hôpital franco-émirien d’Abu Dhabi, le cabinet AIA n’a pas oublié de réserver une aile du bâtiment aux « VIP » qui peuvent, à leur guise, bénéficier d’une chambre dont la superficie varie de 70 à 120 m2.
Pour les architectes, il faut surtout s’adapter en permanence aux réformes de l’offre de soins et aux capacités de prise en charge. « De 1939 à la fin des années 80, l’hôpital français est passé de 50 000 à 600 000 lits, explique Alain Eyraud. Aujourd’hui, avec le développement de l’ambulatoire, la durée des séjours régresse, le processus inverse est engagé ».
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