Pour pallier la pénurie médicale, le gouvernement espère créer 5 000 postes d'infirmiers en pratique avancée (IPA) dans les équipes de soins libérales et hospitalières à l'horizon du quinquennat.
Soumis à concertation depuis des mois, les textes qui vont donner corps à ce nouveau métier ont été corrigés en faveur des médecins dont la tutelle est clairement renforcée dans le suivi des patients. De fait, le dernier projet de décret et les deux arrêtés modifient le périmètre de ce « super-infirmier », métier intermédiaire de niveau master prévu par la loi de santé, et affirment surtout le rôle décisionnaire du médecin dans la coordination du parcours de soins des patients éligibles à cette prise en charge (jusqu'ici expérimentale et hospitalière).
Les médecins ont ainsi obtenu l'inscription d'un « protocole d'organisation » précisant les règles de collaboration entre les IPA et les praticiens. Ce document balise les modalités de prise en charge du patient, la régularité des échanges d'informations entre l'IPA et le médecin (partage du dossier médical, staff), les « conditions de retour du patient vers le médecin », la conduite à tenir en cas d'alerte ainsi que les recommandations de la HAS et les protocoles de soins. « Le médecin, en lien avec l'IPA, décide des patients auxquels un suivi par cet infirmier sera proposé », affirme le texte. C'est donc bien le praticien qui garde la main.
L'IPA n'interprète pas les résultats
Alors que les structures de médecine générale redoutaient un dispositif hospitalo-centré, les nouveaux textes définissent son champ d'action en ville. L'IPA pourra bien exercer « en pratique ambulatoire » « au sein d'une équipe de soins primaires coordonnée par le médecin traitant ».
Les quatre domaines d'intervention de l'IPA sont amendés. Le paramédical intervient toujours dans la prise en charge de huit pathologies primaires stabilisées mais aussi dans le champ intitulé « prévention et polypathologies courantes en soins primaires ».
Outre l'oncologie, il peut aussi s'impliquer en hémato-oncologie et dans la maladie rénale chronique, la dialyse et la transplantation rénale. En revanche, le champ de la santé mentale et de la psychiatrie a été biffé de la dernière mouture de projet de décret.
Autre modification majeure : si l'IPA est habilité à réaliser des actes techniques (fixés par arrêté), prescrire des examens complémentaires et des dispositifs médicaux, renouveler ou adapter des ordonnances en cours ou encore demander des actes de suivi et de prévention, il ne peut plus « interpréter les résultats », responsabilité dans le giron exclusif du médecin.
« Inacceptables régressions »
La nouvelle version des textes ne satisfait pas la profession infirmière qui dénonce « d'inacceptables régressions » dans un communiqué écrit par dix organisations (dont les syndicats, l'Ordre, le collège, etc.).
Les médecins, eux, se montrent globalement satisfaits de cette réécriture, même si des zones d'ombre persistent. MG France apprécie le distinguo entre le champ d'action ambulatoire de l'IPA, plus précis, et le champ hospitalier, plus bordé. « On craignait que des infirmiers hospitaliers d'un service de diabéto viennent travailler en ville », argumente le président Jacques Battistoni. De leur côté, les jeunes généralistes de ReAGJIR saluent la reconnaissance des soins primaires dans le décret même si, sur le fond, le syndicat juge le périmètre d'action des IPA trop restreint.
« Le médecin devait rester le chef d'orchestre de la coordination, le texte a bougé en ce sens », se félicite le Dr Jean-Paul Ortiz, patron de la CSMF. Le SML s'inquiète en revanche de l'impact financier de ce nouveau métier pour les médecins. « Si les IPA viennent piquer notre boulot, la moindre des choses est que nous percevions une compensation pour le manque à gagner », suggère le Dr Philippe Vermesch.
Padhue : Yannick Neuder promet de transformer les EVC en deux temps
À Niort, l’hôpital soigne aussi les maux de la planète
Embolie aux urgences psychiatriques : et maintenant, que fait-on ?
« Les Flying Doctors », solution de haut-vol pour l’accès aux soins en Bourgogne