Un appel de SAMU-Urgences de France

Les urgentistes ne veulent plus gérer la recherche de lits

Publié le 19/09/2013
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Crédit photo : S Toubon

LA DATE du 15 octobre est avant tout symbolique. Elle est censée marquer un « changement de paradigme » à l’hôpital, selon le Dr Marc Giroud, président de SAMU-Urgences de France.

L’enjeu est déterminant. Il s’agit d’apporter une réponse efficace à l’engorgement des urgences, source de mécontentement pour les patients et de démotivation pour les praticiens. La santé publique est aussi en jeu : une étude* publiée dans le « BMJ » établit une corrélation entre le temps d’attente et la morbi-mortalité. S’éterniser sur un brancard, « cela tue les malades, y compris les moins graves », assène le Dr Dominique Pateron, chef des urgences de l’hôpital Saint-Antoine à Paris.

Selon le syndicat national de l’aide médicale urgente, la solution se situe moins en amont qu’en aval. Les politiques, jusqu’à présent, ont surtout misé sur le médecin traitant (et son rôle régulateur), les maisons médicales de garde, les créations de postes d’urgentistes.

L’aval des urgences, l’affaire de tous.

Le 15 octobre, les urgentistes lèveront le pied. Ils appelleront moins souvent dans les étages. Si le service de pneumologie ne peut accepter un pneumothorax, par exemple, l’urgentiste déléguera à un tiers le soin de dénicher un lit ailleurs. Les gestionnaires de lits ne résoudront rien à eux seuls. SAMU-Urgences de France appelle chaque hôpital à inventer sa propre politique de l’hospitalisation (mise en place d’un circuit court - « fast track » - pour les urgences simples, création d’un salon d’attente pour libérer les lits d’hospitalisation au plus tard à midi...). L’objectif : que l’activité programmée s’adapte à l’activité non programmée. Et non plus l’inverse.

Vitrine de ce nouvel état d’esprit avec une poignée d’établissements, le CHR de Metz-Thionville innove. Une cellule de cinq personnes (un cadre et quatre infirmiers) gère l’aval des urgences sept jours sur sept. Un outil informatique propose aux chirurgiens des créneaux pour l’activité programmée, de sorte que l’hôpital dispose chaque jour de 50 lits pour les urgences. Des filières ont vu le jour. Le brancardage est plus réactif, la radiologie aussi.

Pour vendre sa boîte à outils, le chef des urgences messin a dû convaincre la direction, les usagers, mais aussi... les confrères des étages. Le dialogue entre l’urgentiste et le spécialiste, peu à peu, se restaure. « La discussion administrative autour du manque de lits polluait les échanges médicaux », observe le Dr François Braun. En quelques mois, le temps de passage moyen aux urgences au CHR de Metz-Thionville est passé de 5h40 à moins de 4h. Le nombre de transferts (3 500 par an) n’a pas encore baissé, mais c’est l’un des buts poursuivis. De quoi rapporter 5 millions d’euros à l’hôpital.

SAMU-Urgences de France, avec ce mouvement inédit, parviendra-t-il à bousculer les habitudes ? Marisol Touraine, en tout cas, se montre réceptive. Après leur avoir adressé une circulaire en juin, la ministre réunira les ARS et les directeurs d’hôpitaux le 30 septembre, pour évoquer avec eux le sujet.

* Étude menée de 2003 à 2007 sur près de 14 millions de patients canadiens ayant fréquenté un service d’urgences dans l’Ontario. Publiée dans le British Medical Journal (BMJ 2011;342:d2983).

DELPHINE CHARDON

Source : Le Quotidien du Médecin: 9264