La réforme Ma Santé 2022 prévoit la nécessité de tenir compte de l’expérience patient grâce à des indicateurs systématiques permettant de mesurer le vécu et le ressenti des personnes confrontées à un problème de santé. Mais comment passer de la théorie aux travaux pratiques ? Comment sensibiliser les établissements et les équipes soignantes ?
Sur le terrain, la prise en considération de l'expérience patient au sein des établissements « progresse » mais reste loin de satisfaire les associations et de répondre aux enjeux, alerte un baromètre* BVA pour l'institut français de l'expérience patient (IFEP).
Et pourtant... La notion d'expérience patient a été introduite en 2002 à la faveur de la loi Kouchner sur les droits des malades. Elle caractérise les interactions d’une organisation de santé avec un patient et ses proches susceptibles d’influencer leur perception tout au long de leur parcours de santé.
Vingt ans après, la notoriété de ce concept reste fragile : seuls 54 % des professionnels du secteur santé (cadres administratifs ou gestionnaires, paramédicaux et praticiens) déclarent avoir déjà entendu l'expression « expérience patient » (et 11 % du grand public !). Cette connaissance est meilleure dans le secteur privé non lucratif (ESPIC, 68 %) que dans le public (58 %) ou les cliniques (49 %).
Corollaire de cette faible maturité, rien ou presque n'a été fait dans ce domaine dans 60 % des hôpitaux. Et quand des initiatives sont prises, elles se limitent souvent à l'annonce formelle par la direction d'une stratégie « expérience patient » et au recueil de données. Les actions concrètes (patient traceur, espace dédié, prestations annexes) restent rares.
De fait, l'amélioration de l'expérience patient apparaît comme un enjeu secondaire pour les établissements (21 % seulement des professionnels citent cet item dans le trio des priorités), loin derrière la démarche qualité/certification (45 %), la gestion et la maîtrise des coûts (43 %), l'ambulatoire (34 %), le recrutement des médecins (27 %) ou la rénovation des locaux... La moitié des établissements qui travaillent sur l'expérience patient ont nommé un responsable en la matière.
Quels sont les points faibles identifiés par les patients ? Invités à noter (sur 10) la qualité de leur parcours de santé, ces derniers saluent la qualité et l'efficacité globale de la prise en charge (7,4), la prise en compte de leur avis (7,2) mais critiquent davantage les délais d'accès (6,8) et la fluidité (6,6).
Soignants vulnérables
Dans ce contexte, les freins au développement de l'expérience patient (cités par les professionnels) sont d'abord liés à la souffrance (burn-out, stress) des soignants eux-mêmes (46 %), aux ressources financières insuffisantes (40 %) et au manque de formation des équipes (27 %).
Quant aux leviers d'amélioration, la priorité serait de renforcer la culture des établissements (49 %), de cibler la formation des équipes (42 %) et de mieux prendre en compte la voix des usagers et des familles. « C'est encore trop souvent un mot-valise, regrette Odile Peixoto, directrice BVA Santé. Il faut considérer le patient comme un vrai partenaire. Et la prochaine étape doit être la collaboration avec les médecins ! L'expérience patient apporte un plus par rapport à ce que connaît le praticien sur la maladie. Elle peut être utile en matière d'éducation thérapeutique. »
Bonne nouvelle de ce baromètre : 94 % des professionnels de santé affirment être disposés (dont 55 % « tout à fait ») à contribuer aux projets d'amélioration de l'expérience patient au sein de leur propre hôpital.
* Étude réalisée par un questionnaire administré entre le 16 septembre et 4 octobre 2019 auprès de 2 401 Français et 1 405 professionnels de santé en établissements de santé ou médico-sociaux (dont 10 % de médecins).
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