Après vingt ans d’atermoiements sur le sujet, les pouvoirs publics ont-ils enfin trouvé le moyen de rendre effective l’obligation de formation pour les médecins ? Un décret relatif aux procédures de contrôle de l’insuffisance professionnelle et aux règles de suspension temporaire des médecins vient relancer le débat.
Paru fin mai au JO, il pourrait en effet servir d’outil de « sanction » pour les professionnels de santé qui n’auraient pas rempli leur obligation de Développement Professionnel Continu (DPC). Du moins sur le papier. MG Form fait en tout cas cette lecture.
Dans un communiqué, l’association de formation de MG France s’inquiète, en effet, de la possibilité de donner à l’Ordre des médecins de « sanctionner ceux qui ne respectent pas leur obligation légale de DPC ». Et de profiter de l’occasion pour « rappeler à tous les professionnels (…) que de nombreux programmes de DPC » sont dispensés par les équipes nationales et régionales de MG Form…
Les médecins qui ne se formeraient pas risquent-ils vraiment aujourd’hui d’être sanctionnés sur cette base ? Le texte prévoit pour les médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes et pédicures-podologues la mise en place du contrôle de l'insuffisance professionnelle pouvant aboutir soit à un refus d'inscription à l'ordre, soit à une suspension temporaire d'exercice. Le décret indique que « s'il est constaté, au vu du rapport d'expertise, une insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession, le Conseil départemental refuse l'inscription et précise les obligations de formation du praticien. La notification de cette décision mentionne qu'une nouvelle demande d'inscription ne pourra être acceptée sans que le praticien ait au préalable justifié avoir rempli les obligations de formation fixées par la décision du Conseil départemental ». Et la même procédure peut être déclenchée pour un praticien déjà en exercice.
« Un outil pour contrôler la formation continue »
À l’Ordre des médecins, on fait néanmoins une interprétation circonstanciée de ce texte. Le Dr Patrick Bouet, président du Conseil National, qui se félicite par ailleurs de la parution de ce décret, attendu depuis cinq ans, rappelle que le « décret n’a pas été conçu initialement pour l’obligation de DPC ». Même s’il admet que « dans un second temps, on peut imaginer que ce texte constitue un outil pour contrôler la formation continue des médecins ». Avant de rassurer : « Nous n’avons pas l’intention de le faire car nous émettons de fortes réserves à l’égard du dispositif de formation actuel ». En d’autres termes, pas question pour l’Ordre de se précipiter alors même que le DPC est actuellement remis sur la table.
Dans ce contexte de remise en chantier, suite au rapport de l’IGAS révélé en mai dernier, on peut d’ailleurs se demander comment le dispositif prévu par le décret pourrait se conjuguer avec la définition actuelle de l’obligation de DPC, plutôt succincte... Une simple attestation de DPC émanant de l’organisme de formation devant être envoyée au Conseil départemental de l’Ordre des médecins (CDOM). à charge ensuite pour chaque CDOM de s’assurer au moins une fois tous les cinq ans que les médecins relevant de son territoire ont satisfait à leur obligation annuelle de DPC.
Prudente, l’institution ordinale préfère de toute façon ne s’en tenir «?qu’à?» la refondation des procédures liées à l’insuffisance professionnelle, qu’elle soit issue d’une pathologie ou remise en doute lors d’une réinscription au tableau de l’Ordre des médecins après un arrêt d’activité de plusieurs années notamment.
La mise en oeuvre de la coercition tiendrait du paradoxe
Dans ces conditions, les médecins doivent-ils s’inquiéter ? Pour le Dr Bernard Ortolan, directeur scientifique d’Evolutis DPC, organisation de formation rattaché à la CSMF, la mise en œuvre de la coercition tiendrait du paradoxe alors même que seuls 20 à 30% des médecins ont pu jusqu’alors bénéficier des financements de l’OGDPC. Dans un communiqué, la CSMF regrette d’ailleurs que le financement ne soit pas réglé. Pendant que MG Form souligne la qualité non garantie des programmes de DPC.
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