« Nous craignons que beaucoup de malades psychiatriques ne décompensent »

Publié le 03/04/2020

Crédit photo : DR

« Dès le début de l'épidémie, nous avons remplacé toutes les consultations en présentiel de notre activité ambulatoire par des téléconsultations, sauf pour certains patients en situations très complexes, qui viennent consulter ou qu'on voit à domicile, car certains n'ont pas d'ordinateur ni même de téléphone.

Nous avons très rapidement fermé une unité de psychiatrie générale de 18 lits sur le site Henri Mondor, pour qu'elle puisse accueillir les urgences générales, notamment des patients atteints de Covid-19. Il a fallu réorienter les patients psychiatriques vers d'autres locaux, car nous sommes déjà à saturation et ne pouvons nous permettre de supprimer des lits.

Nous réfléchissons beaucoup à la prise en charge de patients psychiatriques qui seraient atteints par le coronavirus. Les mesures barrières sont très difficiles à faire respecter : beaucoup ont des troubles de la compréhension, du comportement, ou des troubles cognitifs ; certains sont en soins sans consentement… Ne serait-ce que faire un test requiert énormément de temps et de personnel. Nous pensons réserver une unité pour isoler les patients psychiatriques positifs ou à risque, afin de ne pas contaminer les autres. S'ils sont très symptomatiques, il faudra constituer des doubles équipes, somatiques et psychiatriques.

Nous craignons que beaucoup de malades psychiatriques ne décompensent, pour de multiples raisons : moindre suivi, rupture de soins, aggravation des troubles psychotiques ou des états de dépression liée au confinement, etc. Et déjà, nous observons une augmentation des passages aux urgences pour tentative de suicide, non sans lien avec le confinement, sur des terrains déjà vulnérables. Nous sommes enfin très vigilants à l'égard des personnels chez qui l'on compte plusieurs cas positifs. »

Pr Antoine Pelissolo, chef du service de psychiatrie sectorisée, CHU Henri-Mondor

 


Source : Le Quotidien du médecin