Le mouvement de grève qui touche les urgences depuis mi-mars tente de prendre de la légitimité en se structurant au niveau national. Ce samedi 25 mai, le collectif inter-urgences, créé au début de la mobilisation par des paramédicaux de l'hôpital Saint-Antoine (AP-HP), organisait à Paris une assemblée générale des personnels en lutte de toute la France. Il fait état de 65 services en grève sur les 515 structures que compte l'hôpital public (hors urgences pédiatriques). Venus de Dieppe, Angers, Lille ou encore Beauvais, au total, environ 200 agents se sont réunis à la Bourse du travail dans le onzième arrondissement de la capitale. Une trentaine de villes étaient représentées.
Cinq membres du collectif inter-urgences, installés derrière une banderole flanquée du slogan « Donnez-nous les moyens d'être humains », animaient les discussions. L'ordre du jour était triple : création d'un comité national de grève, élaboration d'un calendrier d'actions et vote d'une motion de revendications nationales.
Comité national de grève
Pour mieux se faire entendre par les pouvoirs publics, le collectif, jusque-là informel, s'est structuré en comité national de grève sous la forme d'une association. « Notre priorité est de créer une entité morale et juridique », explique Hugo Huon, infirmier à l'hôpital de Lariboisière (AP-HP). Le comité de grève devra être composé de 8 représentants paramédicaux, sans étiquette syndicale, répartis entre les différentes régions engagées et 3 représentants syndicaux, un pour chaque centrale qui soutient le mouvement (FO, CGT et SUD). L'élection du bureau devrait avoir lieu dans les prochains jours. Dès sa création effective, le comité sollicitera un rendez-vous avec Agnès Buzyn pour lui présenter ses revendications. Jusqu'à présent, la locataire de Ségur n'a semblé prêter que peu d'attention au mouvement. La ministre s'est en effet très peu exprimée sur le sujet, évoquant simplement il y a quelques semaines devant les députés la « désorganisation » du système.
L'assemblée générale a également fixé un calendrier d'action pour les prochaines semaines. Une journée de mobilisation nationale est ainsi prévue le 6 juin à Paris. D'ici là, le collectif appelle l'ensemble des services d'urgences à débrayer symboliquement pendant quelques minutes le mardi 28 mai à midi. En parallèle, plusieurs idées ont été évoquées comme la création d'une chaîne Youtube commune pour relayer les vidéos réalisées par les personnels des différents services d'urgences mobilisés.
Un cahier de revendications nationale a été voté par les participants. Elle fixe notamment l'arrêt des fermetures de lits, de services et de lignes de SMUR, l'augmentation de tous les salaires de 300 euros nets par mois et la hausse des effectifs d'abord pour atteindre le référentiel fixé par SAMU-Urgences de France (SUDF), ensuite en fonction de l'activité des services. Enfin, « nous demandons la titularisation de tous les contrats courts travaillant actuellement aux urgences », précise Hugo Huon.
Les médecins peinent à se positionner
Pour l'instant, les praticiens hospitaliers restent aux abords de ce mouvement. Faut-il les inviter à se mobiliser ou, au contraire, s'en éloigner ? Les syndicats de personnels sont désunis sur la question. Le Dr Olivier Varnet, secrétaire général du Syndicat national des médecins hospitaliers - Force Ouvrière (SNMH-FO) appelle les médecins à s'engager. « Nous encourageons les médecins à participer aux assemblées générales et à décider, quand les conditions sont réunies, de faire la grève », explique-t-il. Pour le neurologue du centre hospitalier de Gonesse (Val d’Oise), la lutte doit être menée de concert avec les paramédicaux. Il s'explique : « La situation des médecins est la même que celle des personnels : fermeture des lits d'aval, manque d'effectif, salaires insuffisants. Donc, nous avons les mêmes revendications mais chacun avance avec son syndicat. »
À l’inverse, le Dr Christophe Prudhomme, porte-parole de l'Association des médecins urgentistes de France (AMUF), syndicat allié à la CGT, met en garde le collectif inter-urgences contre le risque de dilution de leur message en cas d'alliance avec les médecins. « Je ne souhaite pas que soient mélangées les problématiques des médecins avec les revendications qui ont été posées. Autrement, le ministère va vous enfumer ! », alerte vivement l'urgentiste.
Selon un rapport du Sénat de 2017, les urgences ont vu leur fréquentation doubler en 20 ans, avec près de 21 millions de passages enregistrés en 2016.
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