Les maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI), maladie de Crohn (MC) et rectocolite hémorragique (RCH), concernent quelque 200 000 personnes en France. Leur incidence est en augmentation : elle a doublé en 20 ans dans la population pédiatrique. La maladie de Crohn touche des sujets jeunes, avec un pic d’incidence entre 20 et 29 ans, et donc des femmes en âge de procréer. Selon des données récentes, il y a moins de grossesses chez les femmes porteuses d’une MC que dans la population générale, et l’âge de la première grossesse est plus tardif. Il s’agit dans la majorité des cas d’un choix délibéré, motivé par des inquiétudes au sujet de la maladie. Il semble donc important de mieux communiquer avec les femmes sur ce sujet.
Comment répondre au désir de grossesse chez la femme atteinte de MICI ?
La fertilité des femmes souffrant d’une RCH ou d’une MC non opérée est comparable à celle de la population générale. Elle est en revanche moindre en cas de MC active ou opérée, en raison de l’inflammation pelvienne, de l’aménorrhée secondaire et d’une baisse de la libido secondaire aux lésions anopérinéales. Après anastomose iléo-anale, le risque d’infertilité est multiplié par 3 en cas de laparotomie, mais bien moindre après abord cœlioscopique. Les différents traitements médicamenteux ne semblent avoir aucun impact sur la fertilité.
En préconceptionnel, il faut donc avant tout s’assurer du bon contrôle de la maladie, de préconiser l’arrêt du tabagisme et de rappeler l’importance de la bonne observance thérapeutique. L’administration de méthotrexate doit être interrompue. Il faut également réaliser un bilan nutritionnel standard, donner une supplémentation en acide folique (1 mg/jour), en fer et en vitamine B12, contrôler le statut vaccinal et les comorbidités, et évaluer le risque thrombo-embolique. Un désir de grossesse chez une femme atteinte de MICI doit être encouragé et encadré.
Quel est l’impact de la grossesse sur l’évolution de la MICI ?
Le taux de rechute de la maladie est inchangé (30 % à 9 mois). Si la maladie est active au moment de la conception, elle restera active durant toute la grossesse chez deux-tiers des femmes, dont deux-tiers présenteront une aggravation. La présence d’une anastomose iléo-anale peut être à l’origine de problèmes de continence, en particulier au 3e trimestre, toutefois résolutifs en post-partum. Les taux de rechute et de chirurgie sont plus faibles chez les multipares, conséquence possible des modulations de l’immunité au cours de la grossesse et des bénéfices du sevrage tabagique. Le suivi de la femme doit être étroit, obstétrical à un rythme mensuel et gastro-entérologique tous les 3 mois. En pratique, 80 % des femmes vivent une grossesse sans complication. Les deux principaux risques sont l’accouchement prématuré (odd ratio de 1,87 par rapport à une population témoin) et le petit poids de naissance (OR à 2,10), et le principal facteur de risque de complication est une maladie active à la conception.
La plupart des traitements utilisés dans les MICI (à l’exception du méthotrexate) ne présentent pas de risques obstétricaux ou fœtaux particuliers et en l’absence de contre-indication, un traitement efficace ne doit pas être interrompu. En cas de poussée, les corticoïdes sont utilisés en première intention.
Le taux de césarienne, programmée ou en urgence, est plus élevé que dans la population générale : un tiers des patientes sont concernées. L’accouchement par césarienne doit être préféré en cas de maladie anopérinéale ou rectale active et d’anastomose iléo-anale ou iléorectale. L’épisiotomie est à éviter chez les femmes ayant une MC du fait d’un risque accru d’atteinte anopérinéale dans les suites du geste. Mais elle reste préférable à une déchirure traumatique non contrôlée.
D’après la présentation du Dr Florian Poullenot, hôpital Haut-Lévêque (Bordeaux)
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