Si la trithérapie a permis de réduire la progression et la mortalité du Sida, elle n'a pas permis de contrôler l'épidémie du VIH/SIDA. Cette épidémie se perpétue toujours silencieuse avec plus de 6 000 nouveaux cas par an en France. Et le vaccin parait encore hors de portée.
La PrEP bouleverse aujourd'hui les stratégies de prévention
Les études menées à ce jour dont deux études françaises (ANRS-Ipergay et ANRS-Prévenir) ont montré que la PrEP était très efficace et bien tolérée chez les personnes séronégatives mais exposées au virus. Des résultats qui ont conduit l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et les différentes Institutions européennes à la recommander dans les pays où sévit l'épidémie et où son incidence est supérieure à 2 ou 3 % par an. Les recommandations en précisent les indications, modalités de prise et de suivi car si la PrEP protège du risque d'infection par le VIH elle n'évite pas la transmission des autres IST (infection à chlamydia, gonococcie, syphilis). « Globalement l'observance est excellente, précise le Pr Jean-Michel Molina (CHU Lariboisière, Paris). Les seuls cas de contamination par le VIH observés l'ont été chez les personnes qui ont arrêté la PrEP sans utiliser le préservatif ».
Le Pr Molina ne s'étonne pas que la PrEP s'accompagne d'un recul de l'utilisation du préservatif. L'efficacité de cette nouvelle prophylaxie équivalente à celle du préservatif et la perception du préservatif comme frein à l'acte sexuel expliqueraient ce comportement. « Une révolution qui n'est pas sans rappeler celle vécue par les femmes lors de l'arrivée de la pilule contraceptive pour éviter les grossesses », précise-t-il.
Compte tenu de l'efficacité remarquable de la PrEP, la recherche s'intensifie. Le développement d'autres molécules comme le cabotegravir et d'autres modalités d'administration (implants, injections à longue durée d'action, et.) est en cours.
Le recours à la PrEP est insuffisant
Le recours à la PrEP par les populations à risque reste cependant limité. À ce jour, seulement 10 000 à 15 000 personnes l'utiliseraient. « Au vu des données épidémiologiques, c'est tout à fait insuffisant, explique le Pr Molina. Ce chiffre devrait être multiplié au moins par 10 pour voir une baisse de la contamination et faire régresser l'épidémie ». Cet objectif chiffré nécessite que des programmes de prévention soient élaborés pour que les populations à risque soient mieux informées sur la PrEP, et qu'au-delà des structures déjà autorisées à la dispenser, comme les CeGIDD et les services hospitaliers spécialisés, les médecins généralistes puissent initier sa prescription (aujourd'hui ils ne peuvent que la renouveler). « Cela permettrait aussi de replacer ces acteurs de santé au centre de la prévention du VIH et des IST », précise le Pr Molina.
Pour ce faire, « les besoins d'une information officielle sont évidents. Les pouvoirs publics devraient communiquer de façon plus claire sur la PrEP. Le rôle de la presse spécialisée, qui a été déterminant dans le domaine des IST et plus particulièrement dans celui concernant le Sida, reste essentiel », a conclu le Pr Jean-Michel Molina.
Pr Jean-Michel Molina. Professeur de maladies infectieuses à l’université de Paris et chef du département des Maladies infectieuses et tropicales (AP-HP, hôpitaux St Louis et Lariboisière, Paris)
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