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Dossier

JFHOD 2016

La gastro-pédiatrie à l’honneur

Publié le 08/04/2016
La gastro-pédiatrie à l’honneur

DOSS MED
VOISIN/PHANIE

Les congrès sont toujours l'occasion de se projeter dans la médecine du futur. Les JFHOD 2016 n'ont pas échappé à la règle, avec beaucoup de communications sur les progrès de l'endoscopie. Mais ces journées ont également permis d'aborder l'actualité de la discipline dans son ensemble avec, notamment, une large place consacrée à la gastro-entérologie pédiatrique.

La gastro-entérologie pédiatrique a été à l'honneur au cours des Journées françaises d’Hépato-Gastroentérologie et Oncologie digestive, avec la mise en lumière d'une pathologie méconnue, le Seipa et la présentation de plusieurs études qui devraient modifier la pratique clinique.

Seipa : connais pas !


Malgré ses symptômes impressionnants et sa relative fréquence, le syndrome d'entérocolite induite par les protéines alimentaires, ou Seipa, est souvent la cause d'une grande errance diagnostique. Il s'agit d'une allergie récemment décrite, due non pas aux IgE mais à une médiation cellulaire. Les premières grandes séries datent de quelques années seulement. Une conférence du Dr Étienne Bidat (Boulogne-Billancourt) a été consacrée à ce syndrome encore souvent méconnu.

Les signes apparaissent généralement tôt, dès les premiers mois de vie. La forme aiguë, la plus caractéristique, se manifeste par des vomissements en jet, incoercibles et itératifs. Fait important, ceux-ci apparaissent après un intervalle libre de plus d'une heure après l'ingestion de l'aliment responsable, ce qui distingue le Seipa des allergies IgE médiées. La diarrhée est inconstante. En revanche, le retentissement est souvent majeur, avec déshydratation, pâleur et léthargie, ce qui peut faire penser à une réaction anaphylactique et conduire à l'administration d'adrénaline. Or cette dernière peut aggraver les symptômes. Le traitement de ces formes sévères repose sur une expansion volémique, dont les effets sont spectaculaires, et sur la cortisone intraveineuse.

Le Seipa chronique se développe de manière insidieuse et évolue vers des accès de vomissements avec intervalle libre, sur fond de signes chroniques (reflux, selles molles). Il peut être responsable d'un retard de croissance.

Les aliments en cause sont souvent le lait de vache ou de soja, mais parfois aussi des aliments solides : céréales, volailles, poisson, fruits de mer… Il n'existe aucun marqueur biologique pour affirmer le diagnostic et seul un test de provocation orale à l'hôpital, difficile à accepter, pourrait confirmer l'allergie. Après éviction de l'allergène les crises disparaissent et une tolérance se développe, généralement en deux ou trois ans.
« C'est un diagnostic que tous nos confrères ne connaissent pas encore, a regretté le Dr Marc Bellaïche (Paris). Ces enfants ont longtemps reçu l'étiquette de gastro-entérite aiguë ou d'intolérance alimentaire et des cas ont été décrits où cette méconnaissance a conduit à des interventions chirurgicales injustifiées. »

La fréquence du Seipa au lait de vache a été évalué à 0,4 % dans une étude prospective israélienne incluant 13 000 nourrissons. Les symptômes étaient toujours apparus durant les six premiers mois de vie et à l'âge de trois ans, 90 % des enfants n'avaient plus d'allergie.

Obésités morbides de l’adolescent : la chirurgie en question


Dans un tout autre domaine, si la chirurgie bariatrique a fait la preuve de son intérêt chez les adultes ayant une obésité morbide, la HAS, dans ses recos de 2011, ne préconisait pas son utilisation chez l'enfant et l'adolescent. Pourtant, « le taux de réussite du traitement médical dans des centres spécialisés pour la prise en charge des obésités morbides de l'enfant est de 5 % seulement », a remarqué le Dr Bellaïche, en se réjouissant que la HAS ait revu son avis en mars 2016 pour conclure que la chirurgie bariatrique doit être envisagée pour les adolescents ayant une obésité morbide, avec complications. Parmi les trois types de chirurgie de l'obésité, la gastrectomie de Sleeve est définitive, ce qui la rend peu adaptée à l'enfant, a-t-il estimé, alors que l'anneau gastrique peut être facilement enlevé et que le bypass est, en théorie, réversible.

Toujours en gastropédiatrie, l'étude d'une cohorte de 147 enfants suivis à l'hôpital Robert-Debré pour une MICI indique que le traitement par infliximab n'a pratiquement aucune chance d'être efficace si l'infliximabémie est inférieure à 4,7μg/ml. Le fait d'être au-dessus de ce seuil multipliait par 6 la probabilité de rémission dans l'ensemble de la cohorte et par 53 chez les patients atteints de maladie de Crohn. Ces données ont des implications pratiques immédiates, car avec la dose de 5 mg/kg d'infliximab, recommandée pour les enfants de moins de dix ans, l'infliximabémie est quasiment toujours inférieure à 4,7μg/ml.

Enfin, une étude multicentrique menée sous l'égide de la Société française d'endoscopie digestive démontre, pour la première fois, les bonnes performances de la vidéocapsule œsophagienne chez l'enfant, pour visualiser les varices œsophagiennes. Sur 81 enfants âgés de 7 à 18 ans atteints de cirrhose ou de varices examinés, la vidéocapsule a permis de détecter les varices œsophagiennes avec une sensibilité de 90,5 % et une spécificité de 100 %. Cette validation de la vidéocapsule en pédiatrie est importante car elle permettra d'éviter des endoscopies sous anesthésie générale parfois mal supportées par les enfants, notamment ceux souffrant de mucoviscidose.

Dr Isabelle Leroy