Depuis 1990, et la première campagne recommandant le couchage systématique des nourrissons sur le dos, le nombre de morts inattendues des nourrissons (MIN), définies comme le décès subit d’un enfant âgé d'un mois à un an jusque-là bien portant, a été réduit de 70 %, passant de 1 500 à 300 à 400 par an en France.
70 % des décès avant six mois
Avec 3,7 cas/10 000 naissances vivantes, la France présente l’une des plus fortes incidences parmi les pays européens, où les taux sont très variables, peut être en partie parce que les méthodes de classification des décès ne sont pas toujours comparables. Dans 40 % des cas, il s’agit d’une mort subite du nourrisson, définie comme une MIN sans cause retrouvée au terme du bilan étiologique systématiquement réalisé. Plus de 70 % des décès surviennent avant l’âge de six mois, 90 % avant l’âge d’un an et 9 % entre un et deux ans. Les garçons sont un peu plus touchés que les filles (sex-ratio 1,8). Depuis 2015, un observatoire national des MIN a été mis en place en France ; cet observatoire permet de recenser les données épidémiologiques, paramédicales et médicales des nourrissons de moins de deux ans décédés subitement et pris en charge dans l’un des 35 centres référents participants.
Triple risque
La MIN est depuis plusieurs années considérée comme d’origine plurifactorielle et répond au modèle du « triple risque » mettant en avant : 1) un enfant vulnérable par son histoire (prématurité, retard de croissance intra-utérin, petit poids de naissance…), 2) à une période critique de développement neurologique, cardiaque et respiratoire (entre un et quatre mois), 3) exposé à des facteurs de « stress » environnementaux (couchage ventral ou latéral, tabagisme passif pendant ou après la grossesse, objets dans le lit, couchage sur une surface inadaptée, infection…). Ces trois facteurs associés constituant une situation à risque majeure pour le nourrisson.
Après le couchage en décubitus ventral ou latéral, qui multiple le risque par au moins 8 (odd ratio de 8,7 à 45 selon les études), l’exposition au tabac, pendant et après la grossesse, vient en deuxième position, avec un risque multiplié par 5, tout comme le partage du lit, notamment chez les moins de trois mois. Autres facteurs de risque : objets dans le lit à risque de recouvrir et étouffer ou confiner l’enfant (couette, couverture, doudou…), surface inadaptée (matelas mou…), et une température trop élevée dans la pièce.
Facteurs protecteurs
Il est donc recommandé que les nourrissons soient couchés exclusivement à plat sur le dos, dans une turbulette adaptée à leur taille et à la saison, seuls, dans un lit à barreaux sans objet, dans une pièce entre 18-20 °C, sans exposition au tabac.
Sont reconnus comme des facteurs protecteurs l’allaitement maternel, surtout s’il est exclusif et prolongé, le couchage dans la chambre des parents jusqu’à l’âge de six mois, les vaccinations, et le recours à la tétine au moment de l’endormissement.
Selon les recommandations de l’Académie américaine de pédiatrie (AAP), réactualisées en octobre 2016, en dehors d’indications médicales ciblées, le monitorage à domicile des fratries d’un bébé décédé n’est pas recommandé tout comme l’utilisation systématique d’appareils ou de matelas d’autosurveillance visant à détecter apnées et bradycardies.
« À l’heure actuelle, il n’y a pas de test ni d’examen qui puisse permettre de faire un dépistage à la naissance, rapporte la Dr Karine Levieux. Quelques études ont été publiées, sur de faibles effectifs et manquent de puissance. La principale mesure qui a fait ses preuves est le couchage sur le dos ».
Plus de 1 000 cas de MIN décès ont été inclus dans l’observatoire depuis 2015, une biocollection, y sera prochainement associée (recueil de sang, urines, LCR…) ; elle devrait permettre de faire de la recherche plus fondamentale.
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