Le trouble de déficit de l'attention/hyperactivité (TDAH) concerne 5 à 7 % des enfants et persiste dans 60 à 70 % des cas chez l’adulte, soit une prévalence de 3 à 4 % dans la population adulte. « On se comporte comme si le TDAH disparaissait à 18 ans et un jour !, ironise le Pr Nader Perroud (Genève). À18 ans, la majorité des patients diagnostiqués n’ont plus de suivi. Les pédopsychiatres ne peuvent plus s’en occuper et les psychiatres adultes ne veulent pas encore s’en charger ! »
De nombreux facteurs convergent pour compliquer le diagnostic et la prise en charge du TDAH après l’adolescence. Cette pathologie étant chronique, on s’attend à ce que les troubles soient toujours présents. Or la maladie n’est pas si stable qu’on veut le croire et adopte des profils évolutifs très différents. Le trouble en lui-même ne disparaît pas, mais peut ne se manifester que de façon épisodique, en fonction des mécanismes adaptatifs que le patient a mis en place. Il peut se modifier, ou ne devenir visible qu’à l’âge adulte et ne se révéler qu’à l’occasion d’un épisode de vie. Certains facteurs protecteurs peuvent momentanément occulter le trouble, comme une activité professionnelle très stimulante, ou une activité sportive de haut niveau : le dysfonctionnement ne se manifestera qu’à leur arrêt.
L’hyperactivité et l’impulsivité peuvent s’atténuer au profit des troubles attentionnels, ou persister sous d’autres formes. C’est généralement l’entourage qui se plaint de ces gens qui ont toujours des milliards de choses à faire, ou de ces personnalités brillantes qui parlent tout le temps et que plus personne ne veut inviter.
Chez l’adulte, on cerne mieux les troubles annexes ou les comorbidités : autisme, troubles de l'attention généralisés, dépression, troubles bipolaires, troubles de la personnalité. Ces pathologies passent généralement au premier plan de la prise en charge et amènent à négliger le TDAH si on n’adopte pas un regard suffisamment attentif et critique. L’anamnèse doit aider lorsqu’elle retrouve une histoire scolaire émaillée de remarques sur un comportement perturbateur, mais certaines personnes peuvent avoir totalement occulté ce passé « turbulent ». L’anosognosie constitue un véritable piège.
« On écoute encore trop souvent les experts pour qui il s’agit de troubles factices, qui correspondent à des comportements normaux au passage à l’âge adulte, poursuit le psychiatre. On est aussi encore très sexiste, car on oublie que les femmes peuvent aussi être atteintes de TDAH ». Chez l’adulte, le TDAH concerne autant les deux sexes, et on doit rechercher chez les femmes des manifestations durant depuis l’enfance. Mais qui n’ont pas attiré l’attention, car le TDAH chez les filles se traduit plus par des difficultés attentionnelles que des problèmes d’hyperactivité et d’impulsivité. Ces jeunes rêveuses « dans la lune » dérangent moins que les garçons insupportables !
Savoir prendre le virage
Alors que le passage du relais de l’enfance à l’âge adulte ne pose pas (ou moins) de problèmes chez un diabétique, seuls 15 à 17 % des adolescents avec un TDAH sont dirigés de façon adéquate dans un service d’adulte et on manque de structures spécialisées. Il faut reconnaître que la période de l’adolescence est encore plus compliquée en cas de TDAH, ceux-ci en ayant souvent assez des traitements et la supervision. Alors que de 25 à 30 % connaissent une aggravation des symptômes à cette période, deux tiers stoppent d’eux-mêmes leur traitement. « Ce qui pourrit les 50 prochaines années de leur vie !, insiste le Pr Perroud. Ils sont généralement en échec de formation, avec des difficultés relationnelles, professionnelles et familiales. Ils ont un surrisque de 20 % de comorbidités psychiatriques et surtout 2 à 3 fois plus de risque de décès par accidents de la route, overdose, suicide ou maladies cardiovasculaires.
Session « Attention au TDAH de l’adulte ! »
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