Migraine

La pie-mère impliquée ?

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Publié le 13/12/2018
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Crédit photo : phanie

Nos connaissances sur les structures intracrâniennes sensibles à la douleur chez l’homme proviennent essentiellement d’observations effectuées lors d’interventions neurochirurgicales réalisées chez des patients éveillés.

Depuis plus de 70 ans, il est admis que les structures intracrâniennes sensibles à la douleur se limitent à la dure-mère et à ses vaisseaux nourriciers, les petits vaisseaux cérébraux et les pies étant considérés comme insensibles. Néanmoins, une étude lancée par le Dr Denys Fontaine de l’hôpital Pasteur à Nice s’est intéressée à cette insensibilité supposée de la pie-mère et de ses vaisseaux nourriciers (1). Elle a porté sur 53 patients du CHU de Nice et de l’hôpital Sainte-Anne à Paris atteints de tumeurs cérébrales devant être réséquées en craniotomie éveillée entre 2010 et 2017. Les repères anatomiques seuls sont insuffisants pour obtenir une résection lésionnelle optimale, alors qu’une cartographie cérébrale permet de déterminer les limites fonctionnelles de la tumeur. Ce n’est possible que par stimulation électrique directe chez le patient éveillé.

Le cerveau des patients a été soumis à diverses stimulations mécaniques propres à l’acte chirurgical pratiqué, pression, toucher, aspiration, par exemple. En cas de perception d’une douleur, les patients devaient indiquer quand et où ils l’éprouvaient, et parallèlement le chirurgien devait noter les structures crâniennes qu’il avait alors stimulées. En peropératoire, le chirurgien a tracé sur un gabarit les emplacements des structures sensibles à la douleur, et les sujets ont indiqué la douleur correspondante en traçant une croix sur un diagramme représentant la tête.

Les patients ont rapporté 93 sensations douloureuses du même côté du cerveau que celui du stimulus. La douleur a cessé dès la fin du geste opératoire, restant supportable.

Un nouvel axe de recherche

Les auteurs de l’étude ont notamment constaté que les stimulations de la pie-mère et de ses vaisseaux nourriciers entraînaient une douleur, localisée la plupart du temps dans le territoire du nerf ophtalmique de Willis, qui innerve le front, les orbites, la cornée, les régions temporales supérieures et antérieures, la racine du nez et la muqueuse nasale. Ces observations plaident donc en faveur d’une sensibilité à la douleur de la pie-mère et de ses vaisseaux nourriciers. Elles permettent également aux auteurs de suggérer que ces structures peuvent être impliquées dans les céphalées, au même titre que les autres structures sensibles du crâne.

Pour des raisons éthiques assez évidentes, mais aussi pratiques (car c’est la branche ophtalmique du nerf trijumeau qui innerve les méninges), il n’a pas été possible lors de cette étude d’explorer systématiquement les structures crâniennes apparues comme sensibles.

Par la suite, des chercheurs pourraient travailler à identifier, à l’échelle moléculaire, les récepteurs impliqués dans la détection des messages douloureux dans le cerveau. Cela pourrait constituer un nouvel axe de recherche pour le traitement des céphalées, notamment de la migraine.

(1) Fontaine D et al. Dural and pial pain-sensitive structures in humans: new inputs from awake craniotomies.Brain. 2018;141(4):1040-8


Source : Le Quotidien du médecin: 9710