La manifestation nationale organisée à l’appel des internes et des chefs de cliniques, et à laquelle se sont ralliés les médecins libéraux et les étudiants, rassemblera à Paris ce dimanche des dizaines de milliers d’opposants au projet de loi de santé. Elle s’inscrit dans la lignée de plusieurs rassemblements historiques. « Le Quotidien » revient sur quatre grandes manifestations qui ont marqué la profession depuis 1980.
• Jeudi 5 juin 1980 : un an avant l’élection présidentielle qui verra la victoire du socialiste François Mitterrand, plusieurs milliers de médecins libéraux (entre 2 000 et 5 000) défilent à l’appel de la CSMF entre le boulevard Duquesne et le boulevard des Invalides pour contester le projet de nouvelle convention médicale et plus particulièrement la possibilité de « conventions individuelles » et la création du secteur II. « Un défilé bon enfant et déterminé, relate « le Quotidien ». Bon enfant parce que ces médecins choisirent, pour flétrir la convention, l’humour et l’ironie voyeuse. On avait amené là un cercueil drapé de noir accompagné de l’épitaphe : " A ma médecine libérale regrettée. Giscard 1981." » Devant le refus successif du ministre de la Santé Jacques Barrot puis du Premier ministre Raymond Barre, de recevoir une délégation de manifestants, le cortège décida de se diriger vers l’Élysée. Sur le pont Alexandre III, des heurts brefs mais violents opposent forces de l’ordre et médecins. Deux journalistes et cinq médecins sont blessés. La CSMF dénonce des « brutalités policières inadmissibles » et prédit : « les médecins se souviendront ». « Cette journée marque une rupture : désormais, les rapports entre le corps médical et les pouvoirs publics seront beaucoup plus tendus que par le passé », résume le Dr Patrick Carlioz, dans son ouvrage « Du syndicalisme à la convention : histoire d’un long fleuve pas si tranquille »*.
• Mardi 11 juin 1991 : Des dizaines de milliers de médecins et de professionnels de santé (infirmiers, pharmaciens, praticiens hospitaliers...) manifestent dans la capitale à l’appel du CNPS et du collectif "Action santé" contre la politique de maîtrise des dépenses de santé menée depuis plusieurs mois par le gouvernement. Ils pointent le risque de « rationnement des soins » que menace d’entraîner une telle réforme. Ils dénoncent également l’absence de revalorisation tarifaire, les contrats de santé entre les médecins et leurs patients et les projets d’enveloppes globales des dépenses.
• Dimanche 10 mars 2002 : Après des mois de conflit avec les pouvoirs publics (grève des gardes et de télétransmission), des milliers de médecins - essentiellement généralistes - et professionnels libéraux, dentistes, infirmiers, ambulanciers, kinésithérapeutes, pharmaciens... (13 000 selon la police, 40 000 selon les organisateurs), défilent à Paris pour demander une revalorisation de leurs honoraires et une amélioration de leurs conditions de travail. Les médecins réclament à cor et à cri le passage de la consultation à 20 euros (une revalorisation dérisoire a porté deux mois plus tôt le C à 18,50 euros). À quelques semaines de l’élection présidentielle, le mouvement de protestation des médecins prend un tour politique. Et Roselyne Bachelot, alors porte-parole du candidat Jacques Chirac, n’attend pas 24 heures pour s’engager sur le C à 20 euros. Le 1er juillet 2012, le tarif de la consultation est effectivement porté à 20 euros.
• Jeudi 10 octobre 2007 : Quelques mois après l’élection de Nicolas Sarkozy à l’Élysée, entre 7 500 et 10 000 internes, chefs et étudiants défilent dans les rues de la capitale à l’appel de l’ISNIH, ISNAR-IMG, l’ISNCCA le SNJMG et l’ANEMF. Ces organisations de jeunes sont mobilisées pour demander la suppression deux articles du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2008 qui prévoient de « revoir les conditions auxquelles est soumis le conventionnement en fonction de la densité de la zone d’exercice ». La liberté d’installation est en jeu.
Le 24 octobre, ils sont à nouveau entre 10 000 et 20 000 à défiler dans les rues de la capitale. La nouvelle génération obtiendra le retrait des mesures coercitives à l’installation, et la tenue d’états généraux, préludes à la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST). Quelques semaines plus tard, Nicolas Sarkozy promet que les étudiants, internes et chefs seront associés aux négociations conventionnelles.
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