En passant par la Lorraine…

Une nouveauté qui inquiète

Publié le 24/02/2017
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Crédit photo : GARO/PHANIE

Les médecins généralistes auraient-ils peur de la télémédecine ? Un peu quand même si l’on en croit une des premières enquêtes sur le sujet auprès de médecins généralistes ruraux. Publiée dans cairn.info, elle s’est déroulée en Lorraine entre juin 2014 et juillet 2015, sous forme de focus groupes rassemblant au total 32 généralistes n’ayant aucune expérience de la téléconsultation.

Dilution du colloque singulier

Et, dans l’ensemble, ce sont plutôt les réticences qui dominent. Si la majorité se montre persuadée que la télémédecine va un peu dans le sens de l’histoire - « c’est inéluctable, comme l’informatisation », note l’un d’eux-, les inquiétudes des praticiens semblent pour l’heure l’emporter sur les bénéfices qu’ils en escomptent. A commencer par la crainte de dilution du colloque singulier. Les médecins interrogés sont nombreux à redouter que la technologie n’entraine une perte de confiance entre patients et médecins, voire un risque pour le secret médical : « Il faudra l’accord du patient aussi, avec une signature », prévient ainsi un médecin.

Certains évoquent aussi la possibilité d’une perte d’information sur le patient, rien ne remplaçant pour eux le contact direct. « Il manque quand même toute la partie où le patient rentre dans le bureau et où on commence déjà à se dire “il y a ci, il y a ça” » , relève un praticien. « Il y a un risque majeur de sous-diagnostic », abonde un autre.

Ce ne sont pas les seuls éléments qui posent question. Pour un bon nombre, c’est tout bonnement la liberté du médecin qui pourrait se voir sacrifiée sur l'autel des e-technologies. Emerge ainsi la contrainte de ne plus pouvoir choisir le confrère consulté : « Il faudrait vraiment que je connaisse bien le correspondant en face », insiste un médecin traitant. La perspective de se faire imposer un processus par des financeurs, qu’il s’agisse de mutuelles, d’opérateurs privés ou de l’ARS est aussi dans bien des esprits. Et, bien sûr, les questions d’argent, de responsabilité ou le temps qu’il faudra pour se former sont sources de préoccupation aussi.

Gain ou perte de temps ?

Plus fondamentalement, la télémédecine pose aux yeux de beaucoup la question de la place du généraliste dans le parcours de soins. Et le facteur temps est souvent évoqué. Non sans une certaine ambivalence d’ailleurs. On redoute que la télémédecine soit chronophage - « On va passer deux ou trois fois plus de temps pour faire cette téléconsultation » - mais, en même temps, on y voit un vrai gain de temps dans un contexte de pénurie médicale : « On est ralenti quand on veut des rendez-­vous. C’est bien simple, un rendez-­vous maintenant c’est six mois », relève un professionnel.
De ce point de vue, certaines disciplines semblent s’y prêter mieux que d’autres pour les généralistes. Ceux de l’étude citent volontiers dermatologie, neurologie ou psychiatrie. Reste qu’avant que ce genre d’expériences se multiplient, il reste visiblement tout un travail à faire pour que la profession s’approprie vraiment le phénomène…
 


Source : Le Généraliste: 2786