C'est le lendemain de la journée mondiale des cancers de l'enfant du 15 février qu'a été voté le plan européen de lutte contre le cancer, dont l'important volet pédiatrique donne le la pour faire avancer les choses.
Les bons résultats de survie des cancers pédiatriques - 83 % de survie à 5 ans - sont souvent mis en avant, mais ce chiffre n'a pas évolué depuis de nombreuses années, et les séquelles peuvent être lourdes. Chaque année, le cancer touche environ 2 200 enfants et adolescents en France et entraîne 500 décès par an.
« Chez l'adulte, environ 40 % des cancers sont évitables en agissant sur le mode de vie, mais pas chez l'enfant, ajoute Patricia Blanc, présidente de l'association Imagine for Margo. Or, seulement 10 % des cancers pédiatriques sont génétiques. Il faut comprendre l'origine des 90 % restants. »
En France, la stratégie décennale de lutte contre les cancers ainsi que la loi de 2019 impliquent un budget dédié aux cancers de l'enfant. Pour l'heure, « ce n'est pas une réalité opérationnelle : il n'y a que 5 millions d'euros dédiés à la recherche fondamentale, et là encore les cancers pédiatriques sont dilués », déplore Patricia Blanc. La Ligue contre le cancer a, quant à elle, soutenu 41 projets chez l'enfant, pour un montant de 3,63 millions d’euros réparti entre 11 équipes de recherche fondamentale.
Innover aussi chez l'enfant
Le plan de lutte contre le cancer porté par la Pr Véronique Trillet-Lenoir, cancérologue à Lyon et eurodéputée, propose de réviser les règlements européens des maladies pédiatriques et orphelines de 2017, « qui n'ont pas vraiment amélioré les choses, explique l'eurodéputée au « Quotidien ». Aujourd'hui, il n'existe que neuf médicaments innovants spécifiques aux cancers de l'enfant, et seuls 10 % des enfants éligibles y ont accès. »
Pour les molécules développées chez l’adulte, « il faut une réglementation des essais cliniques qui incite, pour les cancers graves et fréquents de l'enfant comme le neuroblastome ou le glioblastome, à prévoir un volet pédiatrique », ajoute la Pr Trillet-Lenoir.
« Les cancers pédiatriques ont des spécificités et ont besoin de traitements nouveaux, abonde Patricia Blanc. On ne peut plus attendre 10 ans qu'un traitement prouve son efficacité chez l'adulte pour l'adapter à l'enfant. Pour des pathologies causées par la même anomalie moléculaire chez l'adulte et chez l'enfant, on doit pouvoir mettre le même médicament à disposition. »
Un incubateur de solutions
Problème : les cancers pédiatriques sont un petit marché qui peine à convaincre les laboratoires des investissements nécessaires, par exemple pour comprendre les différences de fonctionnement de l'immunothérapie entre enfants et adultes.
C'est dans l'objectif de résoudre ce problème d'attractivité que le nouveau modèle « Made for Kids » a été imaginé par Imagine for Margo. En collaboration avec Creative Valley, un réseau d'incubateurs de start-up, l'association lance cet écosystème destiné à attirer investisseurs et start-up pour répondre aux besoins spécifiques de l'oncologie pédiatrique.
« Nous allons partir de problématiques concrètes comme la perte de fertilité à l'âge adulte ou la rééducation, et essayer de rassembler financeurs, chercheurs autour de projets de solution », précise Patricia Blanc. Exemple : si une molécule peut être repositionnée, un appel d’offres sera lancé afin d'identifier une start-up pour réaliser les essais cliniques nécessaires. L'emplacement des locaux n'est pas encore défini, mais le plateau de Saclay est pressenti. Un centre pilote de prise en charge des cancers pédiatriques va également voir le jour à Chambourcy.
Une charte de soutien à l'oncopédiatrie
De plus, à l'occasion du colloque Fast organisé le 12 février par l'association Imagine for Margo, douze acteurs stratégiques (Unicancer, Gustave-Roussy, Institut Curie, le Leem, les laboratoires Roche, Sanofi, BMS, Amgen, Orphelia…) et huit associations ont signé une charte de soutien à l'oncopédiatrie. « Ce n'est pas une pétition mais une véritable charte d'engagement », précise Patricia Blanc. Les signataires promettent notamment de reconnaître le statut de cancer rare chez l’enfant et l’adolescent, d'accélérer la mise au point de nouveaux traitements et d'essais cliniques, d'œuvrer pour le développement de la formation en oncologie pédiatrique et l'information des familles.
Le rapport européen propose aussi la création d'un réseau européen de jeunes ayant survécu au cancer. « Un autre point très important à mes yeux est le droit à l'oubli, inventé par la France et adopté par cinq pays. Nous devons maintenant nous battre pour qu'il soit aussi adopté par les 22 pays qui restent », insiste la Pr Trillet-Lenoir.
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