Résultats des derniers essais cliniques

Lipides et insuffisance cardiaque à l’honneur

Publié le 09/03/2015
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Un échec, un espoir, un succès… Telle pourrait être résumée l’année 2014 en matière d’essais cliniques sur les lipides.

Un échec d’abord, avec les résultats négatifs d’un essai de phase 3 ayant évalué l’impact du darapladib, un inhibiteur de la Lp-PLA2, dans le syndrome coronaire aigu. Plus l’activité de cette lipoprotéine s’accroît, plus le risque de maladie coronaire ou de décès cardiovasculaire augmente. D’où le rationnel d’utilisation d’un inhibiteur de la Lp-PLA2 chez des sujets après un syndrome coronarien aigu (SCA). L’étude SOLID-TIMI 52 a randomisé 13 000 patients, âgés en moyenne de 60 ans et présentant un SCA, pour recevoir du darapladib ou un placebo. Après un suivi moyen de 2,5 ans, aucune différence n’a été mise en évidence entre les deux bras thérapeutiques sur le critère primaire, qui associait décès coronaires, infarctus du myocarde (IDM) non fatals et revascularisations coronaires en urgence.

Un espoir, avec le programme d’études sur le PCSK9, nouvelle cible pour réduire le LDL-cholestérol. Plusieurs molécules inhibant le PCSK9 sont en développement, dont l’alirocumab qui est évaluée dans le cadre du programme ODYSSEY chez les patients à haut risque cardiovasculaire ou avec une hypercholestérolémie familiale. Dans l’une des études au long cours versus placebo, des résultats très significatifs ont été rapportés sur le LDL-c après 52 semaines de traitement. L’administration de l’anticorps monoclonal permet de diminuer le LDL à des taux très bas, de l’ordre de 0,5 g/l. Parallèlement, une réduction des événements cardiovasculaires est rapportée.

Un succès enfin, avec les résultats de l’étude IMPROVE-IT, qui démontre, versus simvastatine, les bénéfices de l’association simvastatine-ézétimibe sur une large cohorte 18 000 patients stables, après un SCA. Cette association s’accompagne d’une baisse marquée du LDL-c (0,53 g/l) et d’une diminution du risque relatif du critère primaire, qui associait décès cardiovasculaires, IDM, angor instable, revascularisation et accident vasculaire cérébral. « Les diabétiques bénéficient particulièrement de cette association, qui s’est montrée bien tolérée », a précisé le Pr Michel Komajda (chef du département de cardiologie, CHU Pitié-Salpêtrière).

Substitution de l’IEC par un double inhibiteur

Dans l’insuffisance cardiaque chronique, les bons résultats de l’étude PARADIGM HF constituent une mini-révolution. Après une phase de run-in, 8 400 patients ont été randomisés pour recevoir de l’énalapril ou du LCZ696, qui associe du valsartan et un inhibiteur de néprilysine. L’étude a été interrompue prématurément en raison du bénéfice du LCZ696 en termes de décès cardiovasculaire (–20 %). La mortalité globale était réduite de 16 % et les hospitalisations pour insuffisance cardiaque de 21 %. Les analyses en sous-groupes montrent que cette réduction des risques s’observe également chez les diabétiques. « Ces données devraient conduire à revoir la stratégie de prise en charge de l’insuffisance cardiaque chronique à fraction d’éjection altérée, en substituant l’IEC par le double inhibiteur », a indiqué le Pr Komajda.

Quant au recours à l’aleglitazar, évalué sur plus de 7 000 patients à haut risque (SCA) dans l’étude ALECARDIO, il a donné des résultats décevants. Ce double agoniste des PPAR α/d a entraîné une baisse plus marquée de l’HbA1c et une augmentation plus nette du HDL-c que le placebo, mais au prix d’un gain de poids de l’ordre de 3 à 4 kg et d’une augmentation de la créatinine. L’essai a été interrompu après 30 mois pour futilité, face à l’absence de différence entre les deux bras thérapeutiques sur le critère primaire et une augmentation des insuffisances cardiaques.

Une analyse complémentaire de SAVOR TIMI 53 a permis de préciser le profil des patients avec un surrisque d’insuffisance cardiaque sous saxagliptine. L’augmentation des hospitalisations pour insuffisance cardiaque (+27 %) s’observe surtout lors des premiers mois après la randomisation, et préférentiellement chez les patients avec une fonction rénale altérée, antécédents d’insuffisance cardiaque et nombreux facteurs de risque associés. Ce surrisque est surtout rapporté chez les patients ayant les taux de NT-pro BNP les plus élevés.

Enfin, dans la maladie coronaire stable, la première étude de morbimortalité avec un anti-angineux est négative. L’essai SIGNIFY qui a inclus 19 000 patients montre en effet que l’ivabradine n’a pas d’impact sur les décès cardiovasculaires ni sur les récidives d’IDM. Dans le sous-groupe avec angine de poitrine sévère, il y a un surrisque d’événement coronaire mortel ou de récidive d’IDM, probablement lié à un excès de bradycardie.

D’après la communication du Pr Michel Komajda, chef du département de cardiologie, CHU Pitié-Salpêtrière


Source : Le Quotidien du Médecin: 9393