On estime que 60 à 85 % des usagers de stupéfiants présentent des lésions cutanées. « Les principaux pourvoyeurs de complications dermatologiques sont le cannabis, les opiacés, la cocaïne, mais elles peuvent aussi être liées aux produits servant à couper la drogue ou au détournement de certains médicaments, y compris à usage vétérinaire », détaille la Dr Amélie Schoeffler, dermatologue au CHR de Thionville. Ces lésions relèvent soit de la pharmacotoxicité des substances, soit de leur injection, avec des localisations très variées du fait de la multiplicité des points d’injection.
Certaines lésions sont pathognomoniques de l’usage de drogue, comme le puffy hand, avec l’aspect de mains boudinées par un œdème indolore prenant le godet, retrouvé dans 5 à 16 % des toxicomanies par IV, qui peut parfois survenir des années après l’arrêt de la toxicomanie et persiste de façon définitive. Il est lié à une insuffisance veinolymphatique du fait de la toxicité des produits sur les parois vasculaires, associée à des thromboses veineuses ou des infections à répétition. Elles peuvent être améliorées par le port de bandes à allongement court au moins 3 fois par semaine, un traitement qui est rarement bien observé.
Certaines cicatrices, séquelles d’injections répétées, sont aussi des marques caractéristiques de la toxicomanie. Il s’agit principalement de cicatrices linéaires, les railroad tracks, localisées sur les trajets des injections IV, ou des pop scars, cicatrices ovalaires ou arrondies irrégulières, hyper ou hypopigmentées, atrophiques ou hypertrophiques, secondaires aux injections intradermiques des produits. Ces lésions typiques sont à rechercher sur toute la surface cutanée. Les cicatrices peuvent avoir aussi un aspect inflammatoire, érythémateux si les injections sont récentes.
On peut aussi observer des nodules cutanés liés à des granulomes à corps étrangers qui se sont développés autour d’agents coupants non solubles.
Les tatouages peuvent être volontaires et destinés à cacher les traces d’injection, mais certains tatouages atypiques, les shooting tatoo sont dus au dépôt involontaire de pigments lors de l’injection, comme à la suie après usage de produits chauffés.
D’autres complications surviennent de manière plus aiguë. Le phénomène de Raynaud, généralement lié à la cocaïne, est caractéristique car il survient de façon unilatérale.
Un prurit souvent généralisé peut survenir immédiatement après injection d’opiacés du fait d’une histamino-libération. Il peut persister de dix minutes à 24 heures.
Enfin certaines autolésions sont liées aux manifestations psychiatriques, surtout sous cocaïne, après des hallucinations tactiles ou une trichotillomanie.
Module « Plaies des toxicomanes »
Article précédent
La compression, mal nécessaire
Article suivant
Pansement bien ordonné commence par la décharge
Petites brûlures… ou pas
Une analgésie sur mesure pour l’enfant
La compression, mal nécessaire
La drogue dans la peau
Pansement bien ordonné commence par la décharge
Un pansement pour les plaies exsudatives
Verneuil : trop de retard au diagnostic
Les atouts de l’alginate
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024