LE QUOTIDIEN : Dès mars 2020, une cohorte de patients français (260 déclarations recueillies sur 46 sites) a été constituée pour répertorier les manifestations neurologiques liées au Covid-19. Depuis le 30 avril, le site de Saint-Denis, ainsi que la Guadeloupe, continuent de décrire le devenir des patients à six mois. Les accidents vasculaires cérébraux (AVC) sont-ils fréquents ?
Dr de BROUCKER : Des AVC ont été retrouvés chez 28 % des patients hospitalisés pour Covid-19 et représentent le second poste de complications neurologiques, après les encéphalopathies. Pour la plupart, il s’agissait d’infarctus cérébraux. Ces AVC sont apparus sept jours en moyenne après les premiers signes de Covid-19. Chez 25 % des malades, c’est l’AVC qui a fait découvrir l’infection. Le risque de survenue d’un AVC touche des patients âgés en moyenne de 65 ans, ayant pour les trois quarts d’entre eux, un facteur de risque vasculaire identifié. Notre hypothèse est que l’inflammation de l’endothélium observée avec le coronavirus, alliée à une certaine thrombophilie, aboutit à la formation d’un caillot, éventuellement constitué sur une artère saine, qui ensuite embolise une artère cérébrale.
Et concernant les encéphalopathies et les encéphalites ?
Observées dans 38 % des cas, les encéphalopathies sont aussi survenues sept à huit jours en moyenne après l’apparition des premiers signes du SARS-CoV-2. Entraient dans cette complication, les dysfonctions globales du système nerveux sans signe de localisation et pour lesquelles on ne retrouvait ni méningite, ni anomalie évocatrice d’inflammation du système nerveux central (SNC). Quelques encéphalopathies ont été décrites sous la forme de retard au réveil après une sédation en réanimation respiratoire. Hormis les cas où l’IRM retrouvait une vascularite associée avec des micro-infarctus et des micro-hémorragies disséminées dans le parenchyme cérébral, ces encéphalopathies ont été de bon pronostic (mortalité de 15 %). Dans 30 % des cas, ces patients présentaient par ailleurs une pathologie neurodégénérative, qui semble donc jouer le rôle de facteur de risque. Avec un âge médian de 65 ans, 70 % de ces patients avaient une forme sévère de Covid-19.
Constatée chez 8 % des patients de la cohorte, l’encéphalite était évocatrice d’une inflammation du SNC à l’origine de troubles de la vigilance et/ou du comportement depuis au moins 24 heures, de crises épileptiques et de signes de localisation en contexte infectieux. L’âge médian des patients était de 67 ans. Aucun facteur favorisant n’a été trouvé. La mortalité a été de 5 %.
Quelles autres troubles neurologiques ont été répertoriés ?
Les syndromes de Guillain-Barré post-infectieux sont apparus en moyenne après 18 jours et ont bien répondu au traitement standard par immunoglobulines polyvalentes (pas de mortalité hospitalière). Sont aussi apparus : des méningites aiguës (3 cas sur 222), des troubles transitoires de la vigilance, des crises épileptiques isolées chez des personnes non connues pour être épileptiques (8 cas), des atteintes des nerfs périphériques en dehors d’un Guillain-Barré (3 cas), une paraparésie de cause indéterminée, des myoclonies généralisées et des combinaisons de symptômes transitoires (céphalées, sensations de malaises, d’instabilité, hoquets incoercibles, anosmies, douleurs neuropathiques à type de brûlures).
Ces manifestations ont-elles été corroborées depuis avril ?
Les complications neurologiques recensées dans la cohorte semblent correspondre à ce que les services de neurologie voient depuis avril 2020, à quelques exceptions près : il a aussi été décrit de rares syndromes d’encéphalopathies postérieures réversibles (PRES) en lien avec des troubles circulatoires cérébraux, des Mild Encephalopathy with a Reversible Splenial lesion (MERS) et des encéphalomyélites aiguës démyélinisantes (EMAD).
Par ailleurs, notre série a été corroborée par une étude italienne de l’hôpital Jean XXIII de Rome. Les complications neurologiques ont une répartition identique à celle que nous avons décrite et concernent également 7,5 à 13 % des malades hospitalisés pour Covid-19.
Quelles avancées thérapeutiques dans la prise en charge des patients hospitalisés ?
On observe moins d’AVC et d’encéphalopathies liées au Covid-19, probablement en raison des progrès importants réalisés depuis la première vague, grâce à une meilleure connaissance de la pathologie et à l’application de traitements standardisés comprenant des anticoagulants et des corticoïdes.
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