Cardio-vasculaire

Avec l’âge, se prémunir des histoires de cœur

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Publié le 22/11/2019
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La soixantaine représente trop souvent l’âge de l’infarctus du myocarde, révélant une pathologie cardiovasculaire qui aurait dû être repérée et prise en charge bien en amont.
Cardio

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Crédit photo : GARO/PHANIE

À l’âge de la retraite, le risque cardiovasculaire (CV) est dominé par l’athérosclérose, coronarienne mais aussi périphérique. Cette pathologie engage parfois le pronostic vital, mais aussi la qualité de vie à plus ou moins long terme en cas d’insuffisance cardiaque.Le risque CV devrait être évalué sans facteur de risque particulier, chez les hommes à partir de 40 ans et les femmes à partir de 50 ans ou en post-ménopause. S’il est de bonne clinique de rechercher une symptomatologie, en particulier à l’effort, celle-ci n’est pas toujours facile à mettre en évidence chez une personne souvent sédentaire.

La check-list des facteurs de risque classiques – HTA, hyperlipidémie, diabète, tabagisme, sédentarité, obésité, antécédents familiaux – permet de statuer sur le niveau de risque, avec l’aide de divers outils dont le diagramme SCORE. Si le risque CV est faible, il sera réévalué tous les 5 ans. S’il est bas ou modéré, « il est désormais recommandé de rechercher une athérosclérose par échographie carotidienne et fémorale, ainsi qu’un score calcique qui peuvent faire passer le patient dans la tranche à haut ou très haut risque », préconisait le Pr Colin Baigent (Royaume-Uni) lors du dernier congrès européen de l’ESC 2019. L’ESC recommande aussi de doser au moins une fois dans la vie la lipoprotéine a (Lpa), qui lorsqu’elle est supérieure à 1,8 g/l traduit un niveau de risque CV très élevé.

D’autres facteurs de risque moins connus ne doivent pas être négligés, dont les pathologies inflammatoires chroniques et les troubles psychosociaux. Une ménopause précoce ou un cancer traité par les anti-aromatases chez les femmes ainsi que la dysfonction érectile ou un cancer de la prostate traité par castration chimique chez les hommes méritent aussi l’attention.

Des objectifs plus stricts

C’est en effet ce niveau de risque qui détermine la stratégie thérapeutique.

Pour l’HTA, le seuil d’intervention médicamenteuse est de 140/90 mmHg, voire dès 130/85 si le risque coronarien est élevé. Il s’agit de ramener la pression artérielle à 140/90 mmHg, jusqu’à 130/80 mmHg si c’est bien toléré, voire chez les moins de 65 ans de viser une PAS entre 120/129 mmHg, selon les dernières recos européennes (ESC-ESH, 2018).

Les objectifs de LDL ont encore été revus à la baisse, avec en particulier pour les patients à très haut risque ou en prévention secondaire une cible <0,55 g/l. Pour les risques haut, modéré ou bas, le LDL doit être ramené respectivement en-dessous de 0,7 ; 1 et 1,16 g/l. (ESC, 2019). Atteindre ces objectifs peut nécessiter d’élever le traitement par statines jusqu’à la dose maximale tolérée, puis de l’associer à l’ézétimibe, voire aux anti-PCSK9 – qui n’ont pas l’AMM dans cette indication en France –. Hélas, la moitié des patients à très haut risque qui devraient recevoir une statine à forte intensité ne la prennent pas ! L’icosapent-éthyl (oméga 3) est associé aux statines devant une hypertriglycéridémie persistante. L’aspirine n’a pas d’indication en prévention primaire en dehors des diabétiques à haut ou très haut risque.

Prévention secondaire

Une fois le traitement prescrit, le plus dur reste à faire : convaincre les patients du bien-fondé d’une baisse importante du cholestérol et de la pression artérielle, tenir compte des effets indésirables de certains traitements et savoir « négocier ». C’est également l’occasion de promouvoir une alimentation moins calorique, moins salée et plutôt de type méditerranéen, de l’arrêt du tabagisme et de la reprise d’une activité physique afin de limiter la baisse de la capacité cardiaque à l’effort inhérente à l’âge. C’est le bon moment, la retraite étant l’occasion de reprendre des activités sportives encadrées par un bilan dont l’ECG d’effort.

Après une complication CV, il est en effet fortement recommandé de respecter ces conseils d’hygiène de vie, en plus du suivi des recommandations concernant la prise en charge thérapeutique. Les substituts nicotiniques ne sont pas contre-indiqués chez un coronarien, y compris dans les suites d’un syndrome coronarien aigu (SCA). « Le réentraînement à l’effort, en particulier après un SCA, est le traitement par excellence, insiste le Dr Dany Michel Marcadet (centre Cœur et santé, Paris). Pourtant, seulement 30 % des patients en bénéficient. » Dans le même ordre d’idée, six mois après un premier infarctus du myocarde, 40% des patients ne suivent pas le traitement « BASIC ».

Dr Maia Bovard-Gouffrant

Source : Le Généraliste: 2889