Pas encore un adulte mais plus un enfant, dans cet entre-deux délicat, l’adolescent se cherche parfois dans la confrontation et le déni du danger. Comment l’aider à mieux se protéger par la vaccination, à accepter une contraception ou un traitement au long cours en cas de diabète par exemple ? Tout comme devant un trouble du comportement alimentaire ou une conduite addictive, la réussite est liée à l’écoute et à la qualité de la relation de confiance.
AUCUN des objectifs de couverture vaccinale (DTCP 95 %, ROR 95 %, HPV 60 %, Hépatite B 70 %) du plan vaccination 2004 n’est atteint. Seulement 24,6 % des adolescents sont à jour de DTCP, ROR et hépatite B ; 10 % des adolescentes ont reçu toutes leurs vaccinations, y compris HPV. Même en exceptant HPV et méningocoque C, à peine à 25 % des adolescents sont à jour.
Les meilleures couvertures vaccinales (CV) sont observées pour les vaccins Diphtérie-Tétanos-Polio, Coqueluche et Rougeole (respectivement 85,7 %, 76,8 % et 88,8 %). Toutefois, explique le Pr Joël Gaudelus, chef de service de pédiatrie à Hôpital Jean Verdier, Bondy, « il faut continuer les efforts pour vacciner, le fait que les CV soient inférieures aux objectifs de 95 % est actuellement inquiétant pour la rougeole. L’écart séparant sa CV de l’objectif - même s’il paraît faible - ne permet pas d’être serein. La maladie est hautement contagieuse : de 2008 à 2012, trois vagues épidémiques de rougeole se sont succédé en France responsables de 26 000 cas déclarés, 1 000 pneumopathies graves, 30 encéphalites, 10 décès ». La moitié des cas de Rougeole sont survenus chez les plus de 15 ans.
Hépatite B, Méningocoque C.
La CV contre l’hépatite B, bonne chez le nourrisson, est mauvaise chez l’adolescent. Seulement 1/3 des adolescents a reçu les 3 doses du vaccin. L’objectif est 2/3. « Les 2 500 à 3 000 hépatites B aiguës par an en France, touchent majoritairement les 20-39 ans mais les 11- 15 ans ne sont pas à l’abri (7 % des cas). Vacciner avec 2 doses à 6 mois d’intervalle est possible si on utilise des concentrations de 20 µg d’antigène », indique le Pr Gaudelus.
Le faible taux de CV (27 %) contre le méningocoque C, ne permet toujours pas fin 2012, d’obtenir une immunité collective et de protéger les bébés non vaccinés de moins d’un an, des graves infections (méningites, purpura fulminans) à Méningocoque C.
HPV chez l’adolescente.
Quant au vaccin anti papillomavirus (HPV) chez l’adolescente, « cinq ans après son introduction dans le calendrier vaccinal, non seulement on n’a pas progressé, mais on a régressé ! Entre 2009 et 2012, on est passé de 31 % des filles avec vaccination complète à 23,6 % !, s’alarme le Pr Joël Gaudelus. L’objectif de 60 % est loin d’être atteint. La médiatisation d’effets indésirables allégués sans rigueur scientifique, en est en partie responsable ». Autre frein, vacciner des jeunes filles proches de la sexualité contre une infection sexuellement transmissible est vécu comme une incitation à débuter la vie sexuelle. « Le nouveau calendrier vaccinal recommande le vaccin HPV entre 11 et 14 ans - ce vaccin est co-administrable avec le dTCP ou l’hépatite B. Il pourrait améliorer la situation. Au Portugal, en Angleterre et en Australie, pays où l’on vaccine à l’école, la CV atteint 70 à 80 % (vaccination complète, 3 doses) et des études mettent déjà en évidence les bénéfices : diminution des lésions du col et des conisations chez les jeunes femmes vaccinées », explique le Pr Joël Gaudelus.
Pour progresser, restons vigilants, sachons convaincre…
Vaccinoscopie 2012, dernière enquête épidémiologique réalisée en 2012 après la rentrée des classes chez les 14 à 16 ans révèle une vaccination des ados très insuffisante. Pourtant, 80 % des adolescents avaient vu un médecin moins de 3 mois auparavant, souvent pour un certificat médical d’aptitude à la pratique d’un sport. La conviction du médecin est primordiale. Bien que 75 % des mères soient favorables à la vaccination, à peine une sur 2 est convaincue du bien-fondé de la vaccination HPV. Quand le médecin conseille le vaccin contre HPV la CV atteint 30,7 % sinon 2,6 % seulement. Même chose pour l’hépatite B : selon que le médecin la conseille ou non, la couverture atteint 42 % ou seulement 18 % ! Pouvoir garder des vaccins au froid au cabinet serait un progrès. Vacciner se fait rarement en une consultation : outre l’accord parental indispensable, le vaccin doit être acheté et un adolescent sur deux ne revient pas.
*D’après un entretien avec le Pr Joël Gaudelus, service de Pédiatrie, CHU Jean Verdier, Bondy.
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