L’EVENEMENT - Pacte de confiance à l’hôpital

Touraine rassure sans convaincre

Publié le 07/03/2013
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Crédit photo : S TOUBON

APRÈS les dépassements d’honoraires et les déserts médicaux, c’est le troisième chantier auquel s’attelle le ministère de la Santé depuis le retour de la gauche au pouvoir. L’hôpital. Un million de professionnels, 64 milliards de dépenses annuelles, 3,5 % du PIB. Un déficit persistant, et une grogne qui monte.

Aux maux bien concrets vécus sur le terrain, Marisol Touraine répond, très souvent, par des mots théoriques : démocratie, parcours, valeurs... D’où une certaine incompréhension, voire, chez certains, une vive déception (lire ci-dessous). L’objectif de la ministre est pourtant de rendre la foi aux hospitaliers. Et de garantir la qualité des soins. La réforme s’appliquera par étapes, sans baguette magique. D’abord des décrets avant l’été, puis une loi de santé publique début 2014. Le tout sur fond de contrainte financière, qui « n’est pas une fin en soi ».

Création d’un « service public territorial de santé »

La logique de territoire constitue le fil rouge du pacte de confiance.

La loi HPST avait aiguisé la concurrence entre les hôpitaux et les cliniques. Marche arrière et repositionnement de l’hôpital, qui devra ne plus se contenter d’accueillir les patients qui viennent à lui, mais contribuer à la santé sur son territoire. La ministre veut inscrire dans la loi la notion de service public territorial de santé. L’hôpital sera le pivot, d’où la grimace des praticiens libéraux, qui crient au grand retour de l’hospitalocentrisme. Dans son rapport, Édouard Couty préconise d’énumérer, sur chaque territoire, les droits et obligations des différents acteurs en matière de permanence des soins, de prévention, de suivi postopératoire... Les libéraux doivent pouvoir être associés à des missions de recherche clinique, ajoute l’ancien directeur des hôpitaux.

L’idée est-elle si neuve ? Voilà des années que les politiques, de droite comme de gauche, vantent les mérites de la médecine de parcours. Les ARS devaient justement pousser au décloisonnement mais des freins demeurent, puissants. La loi HPST n’a pas abattu les murs entre la ville et l’hôpital. Pour les fissurer, Marisol Touraine veut user du levier financier. La tarification à l’activité (T2A) sera révisée dès le prochain PLFSS, de façon à introduire une part de forfaits dans le paiement des séjours hospitaliers. L’étape suivante consistera à financer le parcours dans sa globalité, depuis la médecine générale jusqu’aux soins de suite. À quelle échéance ? Le but est affiché, pas le calendrier.

D’autres mesures sont annoncées : l’élaboration par les ARS de schémas régionaux d’investissement en santé ; le renforcement des prérogatives des CME ; la création d’un comité technique des usagers, d’un observatoire national du dialogue social, ou encore d’une 2e section au CHSCT, réservée aux médecins.

Les cliniques se sentent tenues à l’écart

Les fédérations hospitalières ont diversement réagi. La Fédération hospitalière de France (FHF) déplore le décalage entre la pommade passée par Marisol Touraine et la forte baisse tarifaire imposée...quelques jours plus tôt aux hôpitaux publics. La Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), en froid avec la ministre depuis l’automne, n’a guère apprécié que les cliniques passent au second plan. « L’exercice du service public hospitalier doit être confié à l’hôpital public, précise le programme ministériel, sans pour autant que celui-ci en ait le monopole ». Quelques mois après la fin de la convergence tarifaire public privé, l’hospitalisation privée vit le « pacte de confiance » comme une nouvelle provocation.

Marisol Touraine entend-elle les protestations du terrain ? Elle assure être à l’écoute, des urgentistes tout particulièrement. « Des postes supplémentaires sont parfois nécessaires, admet-elle, mais le plus souvent, ce sont bien des questions d’organisation que chacun connaît auxquelles nous devons nous attaquer. L’urgence n’est pas le problème des seuls urgentistes, mais de l’hôpital tout entier. Pas le problème du seul hôpital, mais du système de santé tout entier ».

DELPHINE CHARDON

Source : Le Quotidien du Médecin: 9224