Le vieillissement peut être plus ou moins bien réussi et la Haute Autorité de santé avait, en 2013, fait la distinction entre trois catégories de personnes âgées. Celles dites en bonne santé, autonomes, sans troubles cognitifs et avec un bon état nutritionnel. Celles dépendantes et/ou malades et entre les deux celles dites fragiles, souvent polypathologiques et polymédicamentées pouvant facilement basculer dans la catégorie précédente. Les sujets diabétiques âgés représentent en outre une population particulière puisque les complications liées au vieillissement s'ajoutent à celles liées au diabète et que le risque d'hypoglycémies est plus élevé.
La première étape de la prise en charge consiste donc à rechercher une fragilité par une évaluation gérontologique standardisée. Les soignants peuvent pour ce faire s'aider de scores cliniques comme la grille Sommaire évaluation du profil gériatrique à l'admission (SEGA) ou les critères de Fried, faciles à utiliser en consultation. Les troubles cognitifs sont à rechercher de façon objective car ils sont souvent sous-estimés par les praticiens, comme cela avait été souligné dans l'étude Gerodiab : selon le ressenti des médecins, la prévalence des troubles cognitifs était de 11 %, alors qu'elle était estimée à 28,8 % par le Mini mental score avec un seuil < 25/30.
Pas de restriction alimentaire
Deuxième élément majeur à prendre en compte : l'état nutritionnel, qui peut être altéré chez un sujet en surpoids. Le score Mini Nutritionnal Assessment (MNA) permet par exemple de détecter simplement le risque de dénutrition. « Le discours sur l'alimentation chez le diabétique âgé diffère de celui préconisé chez le sujet plus jeune, rappelle le Pr Lyse Bordier, service d'endocrinologie et maladie métaboliques, hôpital Bégin, Saint-Mandé. Il ne faut pas imposer de restriction alimentaire et veiller à des apports suffisants en énergie et en protéines. Les repas doivent être de trois par jour, éventuellement complétés par des collations et il faut éviter les longues périodes de jeûne ».
Les hypoglycémies sont en effet plus fréquentes après l'âge de 75 ans : un tiers des patients dans les six mois avant l'inclusion dans l'étude Gerodiab (âge moyen 77 ans sans perte d'autonomie), dont 3,3 % d'épisodes sévères. La survenue d'hypoglycémies expose notamment à un risque accru de nouvel épisode, accroît le risque de chutes, altère les fonctions cognitives, augmente le risque d'hospitalisations, d'événement cardiovasculaire et de décès.
Enfin, il ne faut pas oublier de tenir compte de la survenue des complications, en particulier cardiovasculaires, qui grèvent le pronostic. La présence d'une insuffisance cardiaque était associée à un doublement de la mortalité à cinq ans dans l'étude Gerodiab.
Trois cibles
Les objectifs glycémiques sont donc adaptés à l'état du patient et au risque d'hypoglycémies : HbA1c ≤ 7 % chez le sujet âgé vigoureux, < 9 % chez les personnes dépendantes et ≤ 8 % pour les sujets fragiles sont les cibles reconnues par la HAS et par la Société francophone du diabète dans sa prise de position de 2017. Cette dernière préconise en première ligne la metformine, sous réserve de l'absence de contre-indication et de sa bonne tolérance digestive, un inhibiteur de DPP4 plutôt qu'un sulfamide en deuxième ligne et une insuline basale en cas d'échec. Les analogues du GLP-1 ont été peu évalués chez les sujets âgés, notamment parce qu'ils peuvent entraîner une perte de poids non désirée dans ce contexte.
« Le patient doit être réévalué régulièrement au cours du suivi car le vieillissement est un processus dynamique, émaillé d'accidents notamment à l'occasion d'épisodes infectieux, ce qui souligne l'importance de la prévention vaccinale dans cette population », conclut le Pr Lyse Bordier.
Le financement de l’étude Gerodiab a été assuré par les laboratoires Novo Nordisk et Merck Sérono ainsi que par une bourse de la Société française de diabétologie (SFD) et un programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) national .
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