Le point de vue Mireille Stivala

Il faut convaincre et non contraindre

Publié le 10/09/2021
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Assez d'injonctions paradoxales ! Les salariés du secteur sanitaire et médico-social en ont eu suffisamment depuis le début de la crise. Et ils ont déjà un taux de vaccination anti-Covid supérieur à la moyenne. Dans ces conditions, la leader de la CGT Santé Action sociale estime que l'obligation de vaccination n'est pas acceptable.

Crédit photo : DR

Le gouvernement a rendu la vaccination obligatoire pour les personnels de Santé et d’Action Sociale mais plus largement pour d’autres salarié.e.s au contact du public. Il s’agit de la mise en place d’une obligation vaccinale et de sanctions possibles qui concernent aujourd’hui des millions de salarié.e.s et cela dans différents secteurs d’activité.

Le ministre des Solidarités et de la Santé ainsi que le gouvernement utilisent régulièrement un vocabulaire réducteur et stigmatisant à l’encontre des professionnels des établissements du sanitaire, médico-social et social, en évoquant cette obligation vaccinale pour « les soignants » alors que ces établissements sont composés d’un maillage de différents métiers, plus de 120, qui les font vivre et prennent en charge la population. Les salarié.e.s dans ces secteurs, avant l’obligation, avaient déjà un taux de couverture vaccinale plus important que pour le reste de la population et le monde du travail en général, ce qui démontre leur spontanéité à réagir pour se protéger et protéger les autres.

Depuis le début de la gestion de cette crise les personnels ont subi constamment de multiples injonctions paradoxales jalonnées régulièrement par des manques de moyens, comme par exemple : l’utilisation et l’insuffisance des masques ainsi que du matériel de protection, des effectifs sous dotés et des personnels atteints de la maladie, asymptomatiques, appelés à travailler, des problématiques d’accès et de repérage des publics prioritaires concernés par la vaccination lors du démarrage de la campagne vaccinale, etc.. Ce contexte a mis à rudes épreuves les professionnels ne facilitant pas et dégradant au quotidien l’exercice de leur mission, leurs conditions de travail et de santé.

Souvent, ils n’ont ni été consultés sur les mesures prises, ni été entendus sur leurs demandes, alors qu’ils sont les indispensables acteurs de terrain expérimentés et qualifiés sur lesquels repose la prise en charge de la population. Ces situations ont engendré de nombreux départs de professionnels qui ont quitté leur activité par épuisement et manque de reconnaissance salariale. Il faut de toute urgence stabiliser, former et recruter massivement du personnel mais aussi rendre ces métiers attractifs.

Discriminations entre salariés

L’obligation vaccinale s’impose dans un climat au sein des établissements et sociétal déjà tendu et divise tant les professionnels que la population sur le sujet. La CGT est favorable à la vaccination qui a fait ses preuves mais « il faut convaincre et non contraindre » et cela ne peut se faire dans n’importe quelles conditions et à n’importe quel prix. C’est par l’information, la pédagogie, le débat que les doutes qui subsistent peuvent être levés et non par la menace et la sanction.

Derrière la mesure emblématique de rendre obligatoire la vaccination pour une partie des salarié.e.s, cette disposition remet en cause une partie de nos droits fondamentaux ; notamment, elle renforce la subordination des salarié.e.s en octroyant aux employeurs des nouvelles dispositions disciplinaires non encadrées et ne pouvant être contrôlées ni par l’inspection du travail ni par la médecine du travail. Elle va créer ou accentuer anticonstitutionnellement de nouvelles discriminations entre salarié.e.s, en fonction de la nature de leur contrat de travail, du poste occupé ou de la branche professionnelle et du lieu dans lesquelles ils exercent leur profession.

Pour la CGT l’endiguement de la pandémie relève des politiques de prévention et de santé publique, plutôt que de le renvoyer à la responsabilité des seuls individus. Pour cela, il faut des moyens supplémentaires pour l’hôpital public et les établissements de Santé et d’Action Social, les services de santé au travail, les personnels et lever les brevets des vaccins.

Exergue : L’endiguement de la pandémie relève des politiques de prévention et de santé publique, plutôt que sur la responsabilité des seuls individus

Mireille Stivala

Source : Le Quotidien du médecin