Quelque 70 000 nouveaux cancers de la prostate sont diagnostiqués chaque année en France, la plupart à un stade localisé depuis le recours au dosage du PSA pour le dépistage, fait à la demande du patient en accord avec le médecin. La mortalité liée à ce cancer diminue de 2,5 % par an, et en dix ans, le nombre de décès qui lui sont attribuables est passé de 12 000 à 8 000 par an.
La question du risque de surtraitement, avec son cortège de complications urinaires et sexuelles, se pose pour un certain nombre de patients. L’étude PIVOT, randomisée, n’a pas montré de différence significative en termes de survie spécifique entre la prostatectomie radicale et la surveillance pour les patients à risque faible ou intermédiaire avec un PSA› 10 ng/ml. La surveillance active est une alternative pour les patients à risque faible, mais l’étude multicentrique européenne PRIAS a montré qu’après quatre années de suivi, 40 % des patients ont finalement recours à un traitement radical.
20% des cancers sont unilatéraux
D’où l’intérêt suscité depuis quelques années par les traitements focaux, dont l’objectif est de ne traiter que la zone de la prostate concernée par le cancer. Comme le rappelle le Dr Albert Gelet, « environ 20 % des cancers de la prostate sont unilatéraux et pourraient potentiellement bénéficier d’un traitement focal ». Par ailleurs, dans un certain nombre de cancers avec foyers multiples, l’agressivité ne serait liée qu’à une seule localisation et le traitement de la seule tumeur index (concept surtout développé au Royaume-Uni) pourrait permettre de modifier l’histoire naturelle de la maladie. Le repérage des cancers agressifs est aujourd’hui permis par l’IRM multiparamétrique, qui détecte 90 % des cancers agressifs et la moitié des cancers non agressifs et permet de réaliser des biopsies ciblées.
Plusieurs technologies sont évaluées pour le traitement focal du cancer de la prostate.
La cryothérapie, qui consiste à refroidir la tumeur à - 40 °C à l’aide de cryodes, est surtout développée aux États-Unis.
L’hyperthermie est obtenue par le recours aux ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU) ; la cible tumorale, chauffée entre 80 et 100 °C grâce à un faisceau d’ultrasons transmis par le biais d’une sonde endorectale, est détruite par nécrose. « À Lyon, nous avons développé un nouvel appareil d’HIFU, FocalOne, qui permet de détruire uniquement la partie de la prostate où se trouve le cancer, précise le Dr Gelet. Le guidage se fait par fusion d’images entre IRM et échographie en temps réel. Une échographie de contraste peut être réalisée en fin d’intervention pour visualiser la zone détruite et éventuellement adapter le traitement ».
La thérapie photodynamique se fonde sur l’activation par un laser d’un produit injecté préalablement par voie sanguine, ce qui entraîne une thrombose vasculaire et donc un infarctus tissulaire.
La curiethérapie ultra-ciblée se base sur l’implantation, uniquement dans la zone cancéreuse, de grains radioactifs de faible rayon d’action. Les études débutent dans quelques centres.
"Les résultats des traitements focaux ne sont pas encore bien établis, insiste le Dr Gelet. Le recul est faible, de 2 à 3 ans, et seules des données à court terme sont disponibles." Globalement, selon une étude multicentrique menée à l’initiative de l’Association française d’urologie sur 100 patients et non encore publiée, le traitement HIFU permet de traiter correctement 85 % des patients porteurs de cancers unilatéraux. Le retentissement urinaire et sexuel semble faible : très peu de troubles de la continence et altération des érections rapportée par 20 % de patients. Des résultats similaires ont été rapportés pour la cryothérapie et la thérapie photodynamique. Les résultats carcinologiques obtenus avec la curiethérapie focale ne sont pas encore connus.
" Il s’agit dans tous les cas de traitements en évaluation, et les patients qui en bénéficient actuellement doivent être inclus dans un protocole de recherche, afin d’avoir des données fiables à moyen et plus long terme, poursuit le Dr Gelet. Des études randomisées doivent être mises en place afin de préciser combien de patients pourront, grâce à un traitement focal, échapper à un traitement radical à échéance de 5 ou 10 ans. Et un registre européen des traitements focaux a été demandé par l’Association européenne d’urologie."
D’après un entretien avec le Dr Albert Gelet, service d’urologie hôpital Edouard-Herriot, Lyon.
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