DEPUIS QUELQUES années les connaissances s’accumulent sur le rôle des mécanismes de régulation épigénétiques dans les maladies cardiovasculaires. Les travaux traitant de méthylation ont mis en évidence l’association d’un certain nombre de gènes méthylables à des fonctions comme la régulation de la pression artérielle, la vasculogenèse, le métabolisme des lipides, et leur implication dans des pathologies majeures telles que l’athérosclérose, l’ischémie, l’hypertension, et l’insuffisance cardiaque. D’autre part, l’importance d’histone deacetylases (HDAC) par exemple dans l’infarctus du myocarde ou la régulation de l’hypertrophie cardiaque ouvre des horizons thérapeutiques avec la mise au point d’inhibiteurs de ces enzymes.
Mais le domaine qui explose depuis 8 ans en physiopathologie cardiaque, avec pas moins de 1 140 publications, est pour plusieurs raisons celui des microARN (miARN). La première étant qu’ils ont l’avantage de pouvoir être criblés de façon systématique avec des puces dédiées, même si on ne les connaît pas tous encore (1 100 environ à l’heure actuelle). Sont d’autre part impliqués en physiologie cardiaque un certain nombre de mécanismes très généraux pour lesquels des miARN découverts dans d’autres contextes (apoptose, angiogenèse, hypertrophie musculaire), constituent de bons candidats à étudier, ce qui a permis notamment de valider miR-1 et miR-133. En addition, la fonction cardiaque, contrairement à d’autres, est régulée par des gènes qui sont eux-mêmes souvent régulés par des miARN, par exemple dans la croissance musculaire (myostatine par miR-208), le cycle cellulaire, ou le métabolisme lipidique. On s’intéresse d’autant plus aux miARN au niveau vasculaire qu’ils sont transportés dans le sang par des microparticules, des nanoparticules, et des lysosomes, et donc capables d’agir à distance de leur site de fabrication et qu’on peut empêcher leur action de façon ciblée, en injectant leurs antagonistes (antagomirs), ce qui n’est en général pas le cas en épigénétique (par exemple avec les inhibiteurs de HDAC). Fait intéressant, en cas d’infarctus du myocarde (IM), certains miARN accrus (miR-1) ou diminués le premier jour reviennent rapidement au taux normal, tandis que d’autres tels que miR-122 et miR-375 sont encore augmentés dans le plasma 30 jours après IM. Plusieurs études retrouvent dans l’IM des miARN augmentés de façon parfois considérable, plus de 100 000 fois pour miR-208 et miR-499, ce qui en fait des biomarqueurs a priori excellents.
À la fois biomarqueurs et cibles thérapeutiques, les miARN semblent très importants en physiopathologie cardiaque, beaucoup plus que d’autres modes épigénétiques de régulation de l’expression. Il reste beaucoup à découvrir sur leurs cibles du fait de l’obligation, en absence de méthode systématique, de recourir à des méthodes assez lourdes.
D’après la communication « Épigénétique » du Dr Daniel Vaiman, directeur de recherche, responsable de l’équipe génomique, épigénétique et physiopathologie de la reproduction INSERM U1016-CNRS UMR8104 Institut Cochin (Paris).
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