La lombalgie commune, non spécifique (sans cause tumorale, inflammatoire, infectieuse ou fracturaire…) se traduit par une douleur ou un inconfort localisé dans la région située entre les côtes et la fesse, avec ou sans douleur dans le membre inférieur. Selon la durée d’évolution, on distingue la lombalgie aiguë (< 6 semaines), subaiguë (6 à 12 semaines) et chronique (> 12 semaines). La lombalgie commune représente 84 % des cas de lombalgie. Elle est l’un des motifs les plus fréquents de consultation en médecine générale (la 2e cause). Un français sur deux a eu une lombalgie au cours des 12 derniers mois. Le pronostic à court terme est favorable dans la grande majorité des cas, les autres évoluant vers la chronicité (7 % des patients). 20 à 44 % des patients présentent des récidives. La lombalgie représente la première cause des dépenses de santé.
La plupart de ces dépenses (93 %) sont le fait d’une minorité de patients et sont liées à l’absentéisme au travail. Une consultation sur 5 donne lieu à un arrêt de travail et la lombalgie représente 1/3 des arrêts de travail de plus de 6 mois. L’évaluation initiale du patient repose sur l’interrogatoire et l’examen clinique en tenant compte des facteurs psychologiques, sources de chronicité.
Pas d’intérêt à réaliser une imagerie
Les examens d’imagerie (radio, TDM, IRM) ne sont pas indiqués dans la lombalgie non spécifique. La prise en charge repose d’abord sur l’information, expliquer et rassurer le patient, ne pas prescrire de repos, lui conseiller de rester actif et de poursuivre ses activités sociales et professionnelles normalement, si possible. Prescrire si nécessaire des antalgiques (paracétamol en première intention, AINS en deuxième), des myorelaxants si besoin en cure courte.
Les examens complémentaires sont recommandés en cas de symptômes faisant évoquer une lombalgie symptomatique : âge < 20 ans ou > 55 ans, antécédents de traumatisme violent, antécédents médicaux de tumeur, altération de l’état général, amaigrissement, fièvre, toxicomanie, immunosuppression, infection VIH, douleur constante, progressive, non mécanique, douleur dorsale, utilisation prolongée de corticoïdes, symptômes neurologiques étendus et déformation rachidienne.
La kinésithérapie n’est pas indiquée dans la lombalgie aiguë sauf dans certains cas exceptionnels : 2 à 6 séances pour une reprise rapide de l’activité et l’éducation du patient. Mais il est parfois difficile de résister au patient demandeur…
En cas de lombalgie subaiguë, récidivante et chronique, des séances de kinésithérapie (10 à 15 séances, maximum 30 séances sur 12 mois) peuvent être prescrites. En l’absence d’amélioration, une consultation spécialisée ou multidisciplinaire doit être proposée.
Des recommandations mal appliquées
Ces recommandations de prise en charge ne sont pas toujours appliquées. Les données de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) sont à ce titre éloquentes : sur 4 460 195 bénéficiaires d’arrêt de travail en 2014, 43 318 l’ont été pour lombalgie avec un arrêt pendant plus de 6 mois consécutifs.
Seuls 15 % d’entre eux n’ont bénéficié d’aucun acte d’imagerie sur la période considérée, 5 % ont bénéficié d’imagerie pendant le premier mois et près de 15 % avaient déjà eu au moins un acte d’imagerie du rachis lombaire dans les douze mois précédant le début de l’arrêt.
Seuls 30 % des patients n’ont pas consulté de chirurgien durant la période de référence. 50 % des patients ont consulté un rhumatologue. 15 % des patients ont eu des séances de kinésithérapie dès le début et sans interruption.
La CNAMTS se mobilise
Pour améliorer les pratiques de prise en charge de la lombalgie, la CNAMTS en partenariat avec le Collège de médecine générale, la Société française de rhumatologie, la Société française de médecine physique et de réadaptation, la Société de médecine du travail et le Collège de la massokinésithérapie a constitué un groupe de travail.
L’objectif est d’élaborer un parcours de soins des patients lombalgiques en intégrant la problématique de l’arrêt de travail et de faciliter les relations entre les différents acteurs. Pour lutter contre la désinsertion socioprofessionnelle, le contact avec le service de santé au travail doit être favorisé. Dans cette optique, il faudrait organiser un échange précoce avec l’accord du patient, entre le médecin traitant et le médecin du travail.
Les actions définies par la CNAMTS et ses partenaires comportent ainsi plusieurs axes : un volet professionnel de santé vers les médecins généralistes et les masseurs-kinésithérapeutes avec la diffusion d’une brochure et un volet patient avec la diffusion d’un livret d’information pour lutter contre les fausses croyances et leur prodiguer quelques conseils afin de conserver une activité physique.
Enfin, une campagne grand public est prévue fin 2017, elle reprendra les messages clés et proposera une approche croisée médecin, patient, employeur, avec une vision intégrée des problématiques santé et travail.
D’après les communications de la Dr Violaine Foltz (rhumatologue CHU La Pitié-Salpétrière), du Dr Julien Le Breton (Collège de médecine générale) et de François Xavier Brouck (CNAMTS).
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