C’EST SUR LE TERRAIN de la connaissance des mécanismes physiopathologiques que l’on a fait le plus de progrès. Ainsi le syndrome de l’intestin irritable (SII) est à l’évidence une maladie multifactorielle qui nécessite l’alliance de plusieurs circonstances favorables à la survenue du SII. Des modifications du microbiote intestinal d’abord, avec des différences qualitatives de la flore par rapport aux sujets sains, même s’il semble que d’une étude à l’autre, ces différences de flore ne soient pas identiques… Certaines populations de lactobacilles et de bifidobactéries en particulier seraient diminuées.
Des débuts d’explication.
On observe encore des anomalies de la perméabilité intestinale (la barrière intestinale est normalement étanche) : le passage d’antigènes alimentaires ou bactériens serait alors possible, qui stimuleraient des cellules immunocompétentes et produiraient chez certains patients une inflammation de bas grade, non perceptible à la coloscopie ou sur des biopsies, mais sur des analyses plus fines, cellulaires : des mastocytes et certaines familles de lymphocytes sont effectivement plus nombreux au contact des terminaisons nerveuses. Truffé de récepteurs à neurotransmetteurs, l’intestin peut être considéré comme un « petit cerveau », par opposition au « grand cerveau » (le vrai cerveau).
Enfin, un sous-groupe important des patients SII perçoit de façon anormale des phénomènes a priori normaux (contractions, distensions, etc.), trahissant une hypersensibilité viscérale. À ces mécanismes périphériques, s’ajoutent des anomalies centrales, du système nerveux central (SNC). Les effets du stress, libérateur de neurotransmetteurs, sont perceptibles sur l’intestin et pour certains, les zones cérébrales qui « s’allument » au moment des repas ne sont pas superposables à celles de sujets sains. « Le dialogue entre grand et petit cerveaux est manifestement perturbé en cas de SII », résume le Pr Ducrotté.
Dernière raison de souffrir d’un SII, plus féminine cette fois, les estrogènes pour lesquels il existe des récepteurs sur certaines terminaisons nerveuses digestives, comme sur les mastocytes, cellules impliquées dans la physiologie du stress…
Pas confortable dans son ventre.
Le signe majeur d’un SII est de ne pas être « confortable dans son ventre », de le sentir, les troubles du transit pouvant être à type de diarrhée, de constipation (pour les femmes surtout) ou d’alternance de diarrhée et de constipation. L’abdomen est ballonné. Et l’on doit s’assurer de l’absence de maladies inflammatoires ou de processus tumoral (même si le SII n’expose pas à un surrisque de cancer digestif, au contraire… la prévalence y est moindre, dans la mesure où ces patients sont régulièrement explorés). De l’observation des symptômes, dépendra la suite des explorations. Une certitude, au-delà de 50 ans, le diagnostic de SII ne doit pas être posé sans examens complémentaires, dont la coloscopie.
Peu de médicaments.
« Deux principes de prise en charge, souligne le Pr Ducrotté, l’écoute des patients, d’une part, (le SII n’est pas une vue de l’esprit) et l’information, d’autre part : faute de données objectives, les explorations étant habituellement normales, et de traitement satisfaisant, ce que l’on sait de la maladie et les idées fausses, sur le cancer notamment, doivent être abondamment discutés. »
En ce qui concerne les traitements, des recommandations, ou plutôt des conseils de bonnes pratiques, sont en cours de rédaction, par le Groupe Français de Neuro Gastro-Entérologie.
Hors les antispasmodiques, l’alvérine ou les argiles, la prise en charge nutritionnelle a évolué… Elle est facilitée par le fait que la majorité des SII ont identifié un lien entre un aliment et la survenue ou l’aggravation de leurs symptômes. Manger des fibres est finalement un conseil plutôt délétère en raison de cette flore différente qui favorise une production accrue de gaz. Et mieux vaut s’en tenir aux fibres solubles, des fruits et légumes. Les SII ne tolèrent pas toujours bien les sucres fermentables, le lactose parfois, le fructose qui, mal absorbés, sont à l’origine de distensions douloureuses.
En deuxième intention seulement, on peut recourir à de très faibles doses d’antidépresseurs, actifs sur la sensibilité viscérale, à l’image de ce que l’on propose pour les douleurs neuropathiques. Ou, dans le cadre d’études expérimentales encore, à des cures de probiotiques.
Les techniques de relaxation, les thérapies comportementales et l’hypnose sont des alternatives non médicamenteuses intéressantes qui permettent de mieux gérer un stress déclencheur de douleurs et/ou mieux vivre avec ses symptômes.
Liens d’intérêt du Pr Ducrotté : Almirall, board scientifique de Mayoli-Spindler.
C’EST SUR LE TERRAIN de la connaissance des mécanismes physiopathologiques que l’on a fait le plus de progrès. Ainsi le syndrome de l’intestin irritable (SII) est à l’évidence une maladie multifactorielle qui nécessite l’alliance de plusieurs circonstances favorables à la survenue du SII. Des modifications du microbiote intestinal d’abord, avec des différences qualitatives de la flore par rapport aux sujets sains, même s’il semble que d’une étude à l’autre, ces différences de flore ne soient pas identiques… Certaines populations de lactobacilles et de bifidobactéries en particulier seraient diminuées.
Des débuts d’explication.
On observe encore des anomalies de la perméabilité intestinale (la barrière intestinale est normalement étanche) : le passage d’antigènes alimentaires ou bactériens serait alors possible, qui stimuleraient des cellules immunocompétentes et produiraient chez certains patients une inflammation de bas grade, non perceptible à la coloscopie ou sur des biopsies, mais sur des analyses plus fines, cellulaires : des mastocytes et certaines familles de lymphocytes sont effectivement plus nombreux au contact des terminaisons nerveuses. Truffé de récepteurs à neurotransmetteurs, l’intestin peut être considéré comme un « petit cerveau », par opposition au « grand cerveau » (le vrai cerveau).
Enfin, un sous-groupe important des patients SII perçoit de façon anormale des phénomènes a priori normaux (contractions, distensions, etc.), trahissant une hypersensibilité viscérale. À ces mécanismes périphériques, s’ajoutent des anomalies centrales, du système nerveux central (SNC). Les effets du stress, libérateur de neurotransmetteurs, sont perceptibles sur l’intestin et pour certains, les zones cérébrales qui « s’allument » au moment des repas ne sont pas superposables à celles de sujets sains. « Le dialogue entre grand et petit cerveaux est manifestement perturbé en cas de SII », résume le Pr Ducrotté.
Dernière raison de souffrir d’un SII, plus féminine cette fois, les estrogènes pour lesquels il existe des récepteurs sur certaines terminaisons nerveuses digestives, comme sur les mastocytes, cellules impliquées dans la physiologie du stress…
Pas confortable dans son ventre.
Le signe majeur d’un SII est de ne pas être « confortable dans son ventre », de le sentir, les troubles du transit pouvant être à type de diarrhée, de constipation (pour les femmes surtout) ou d’alternance de diarrhée et de constipation. L’abdomen est ballonné. Et l’on doit s’assurer de l’absence de maladies inflammatoires ou de processus tumoral (même si le SII n’expose pas à un surrisque de cancer digestif, au contraire… la prévalence y est moindre, dans la mesure où ces patients sont régulièrement explorés). De l’observation des symptômes, dépendra la suite des explorations. Une certitude, au-delà de 50 ans, le diagnostic de SII ne doit pas être posé sans examens complémentaires, dont la coloscopie.
Peu de médicaments.
« Deux principes de prise en charge, souligne le Pr Ducrotté, l’écoute des patients, d’une part, (le SII n’est pas une vue de l’esprit) et l’information, d’autre part : faute de données objectives, les explorations étant habituellement normales, et de traitement satisfaisant, ce que l’on sait de la maladie et les idées fausses, sur le cancer notamment, doivent être abondamment discutés. »
En ce qui concerne les traitements, des recommandations, ou plutôt des conseils de bonnes pratiques, sont en cours de rédaction, par le Groupe Français de Neuro Gastro-Entérologie.
Hors les antispasmodiques, l’alvérine ou les argiles, la prise en charge nutritionnelle a évolué… Elle est facilitée par le fait que la majorité des SII ont identifié un lien entre un aliment et la survenue ou l’aggravation de leurs symptômes. Manger des fibres est finalement un conseil plutôt délétère en raison de cette flore différente qui favorise une production accrue de gaz. Et mieux vaut s’en tenir aux fibres solubles, des fruits et légumes. Les SII ne tolèrent pas toujours bien les sucres fermentables, le lactose parfois, le fructose qui, mal absorbés, sont à l’origine de distensions douloureuses.
En deuxième intention seulement, on peut recourir à de très faibles doses d’antidépresseurs, actifs sur la sensibilité viscérale, à l’image de ce que l’on propose pour les douleurs neuropathiques. Ou, dans le cadre d’études expérimentales encore, à des cures de probiotiques.
Les techniques de relaxation, les thérapies comportementales et l’hypnose sont des alternatives non médicamenteuses intéressantes qui permettent de mieux gérer un stress déclencheur de douleurs et/ou mieux vivre avec ses symptômes.
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