En finir avec l’hésitation vaccinale

HPV : il est temps de prévenir !

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Publié le 31/10/2019
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Plusieurs revues de littérature d’envergure ont confirmé cette année l’efficacité et la sécurité du vaccin HPV. Cela suffira-t-il à convaincre les patients ?
Au pays de Pasteur, les vaccins suscitent toujours la méfiance

Au pays de Pasteur, les vaccins suscitent toujours la méfiance
Crédit photo : Phanie

La mise en place d’un dépistage national du cancer du col de l’utérus, les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) concernant la séquence frottis-test HPV selon l’âge des patientes, les déclarations de la ministre de la Santé, de l’Académie de médecine, « l’appel des 50 », vont-ils suffire à couvrir la voix des polémistes et faire comprendre à nos concitoyens l’intérêt de faire vacciner les enfants, garçons ou filles, afin de combattre la progression des atteintes par les HPV ? Ces virus (plus de 200 sous-types existent dont 40 sont pathogènes) sont responsables d’infections du tractus anogénital. Certains, comme le 6 et le 11, ne sont pas oncogènes mais sont retrouvés dans 90 % des verrues génitales (condylomes). Douze sont à haut risque : les 16, 18, 31, 33, 35, 39, 45, 51, 52, 56, 58 et 59. Ils vont jouer un rôle dans la survenue des cancers du col de l’utérus mais aussi du pénis et, dans les deux sexes, de l’anus et au niveau oropharyngé.

De 75 à 80 % (voire 99 % pour certains types) des personnes sexuellement actives vont être infectées au cours de leur vie. Ces virus sont hautement contagieux, ils peuvent être transmis par les mains. Dans 90 % des cas, l’HPV va être éliminé spontanément en un an. Au contraire, il va parfois être à l’origine de lésions qui vont évoluer, dans un délai de 10 à 15 ans, vers une lésion précancéreuse et parfois un cancer.

L’HPV serait responsable de 4 670 cancers par an chez la femme, dont 3 000 du col, 190 de la vulve et du vagin, 1 100 de l’anus et 380 cancers oropharyngés. Il est également à l’origine de 30 000 lésions précancéreuses du col ; on déplore ainsi 35 000 conisations par an en France, qui ne sont pas sans conséquences sur la fertilité des patientes, la survenue de fausses couches ou d’accouchements prématurés. Chez l’homme, l’HPV est à l’origine de 1 300 cancers ORL par an (35 % du total), 360 de l’anus et 90 du pénis.

L’incidence des cancers de l’anus – dont 90 % sont liés au HPV – augmente : de 160 % chez l’homme et 78 % chez la femme depuis 30 ans aux États-Unis. Ce risque est majoré chez les d’homosexuels masculins ou les patients VIH+ (Inca 2012). Selon les publications de l’Inca en 2018, on assiste à une réduction de l’incidence de – 1,8 %/an du cancer du col utérin entre 1990 et 2018, certainement grâce au dépistage. Mais, depuis les années 2000, il y a un ralentissement de cette baisse, voire une augmentation, en relation avec l’accroissement du risque chez les femmes nées après 1950 (contraception, diminution de l’âge du premier rapport, augmentation du nombre de partenaires).

Une protection pour toutes les localisations

Quel que soit le type de cancer, la vaccination va avoir une efficacité de prévention primaire. La prévention secondaire par dépistage n’est pas possible dans les autres localisations que le col utérin.

En 2018, une publication de la base de données Cochrane (1) a recensé 26 essais contrôlés randomisés ayant inclus au total plus de 73 000 patientes ; elle confirme l’efficacité et la sécurité du vaccin, notamment la réduction du risque des lésions précancéreuses : 164 versus 2 pour 10 000. Une publication encore plus récente dans le Lancet (2) confirme cet effet sur 8 ans de suivi et 60 millions d’individus dans 14 pays. En Australie, où filles et garçons sont vaccinés, on assiste à la quasi-disparition des infections à HPV 6/11/16/18 chez les femmes de 18 à 24 ans. D’autres études récentes confirment l’action du vaccin sur la prévention des infections orales ou anales notamment grâce au vaccin nonavalent.

Le Comité consultatif mondial pour la sécurité des vaccins de l’OMS avait en 2007 insisté sur le fait que les vaccins étaient « extrêmement sûrs ». L’absence d’association entre la vaccination HPV et le risque de maladies démyélinisantes a été confirmée (3).

Mais alors, comment en finir avec l’hésitation vaccinale ? Quel que soit le vaccin, les Français ont une réticence concernant leur sécurité. Il y a un fossé entre les intentions vaccinales et le comportement individuel. « Pour faire évoluer les mentalités, il va falloir s’ajuster au profil du patient grâce à un entretien motivationnel en s’aidant de subterfuges : laisser penser que beaucoup l’ont fait, en donnant son propre avis médical », affirme la psychologue Aurélie Gauchet (Grenoble) proposant aussi d’aider le patient dans la planification : où se faire vacciner, qui va s’en occuper. L’utilisation du regret anticipé peut être intéressant : « malgré les résultats des nombreuses études, vous allez prendre la décision de ne pas vacciner votre enfant. Si plus tard elle présente des lésions, quelle sera votre attitude vis-à-vis de vous-même ? », suggère de demander la spécialiste, pour qui il faut aussi savoir valoriser la bonne décision et inciter les patients à diffuser l’information.

Boulogne

Communications des Pr et Drs Philippe Descamps (Angers), François Vié Le Sage (Aix-Les-Bains) et Aurélie Gauchet (Grenoble) lors de la session « Actualité du HPV » soutenue par MSD vaccin

(1) Arbyn  M et al. Coch Datab Syst Rev 2018(5)CD009069

(2) Drolet M et al. Lancet 2019(394)10197:497-509

(3) Mouchet J. Pharmacological Research 2018(132):108-18

Dr Lydia Marié-Scemama

Source : Le Quotidien du médecin