Une place de plus en plus reconnue

L’essor de la neuromodulation

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Publié le 02/12/2019
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Le traitement des maladies psychiatriques – dépression résistante et schizophrénie en particulier – par techniques physiques connaît un fort développement. Certaines sont validées dans des indications précises, mais non encore inscrites à la nomenclature. Les résultats des études médico-économiques, en cours, sont donc très attendus.
La réponse est comparable à celle rapportée avec les antidépresseurs, au prix de moins d’effets secondaires

La réponse est comparable à celle rapportée avec les antidépresseurs, au prix de moins d’effets secondaires
Crédit photo : Phanie

« Différents projets de recherche de type PHRC ont été conduits ces dernières années sous l’impulsion de la section Stimulation transcrânienne en psychiatrie (Step) de l’association française de psychiatrie biologique et neuropsychopharmacologie (AFPBN), afin d’augmenter le niveau de preuves de ces traitements », rappelle le Pr Emmanuel Poulet (Lyon), à l’origine du club « rTMS et psychiatrie », premier réseau national créé en 2006, et coordinateur du DIU dédié à ces pratiques avec les Universités de Nantes et Bordeaux. « Une évolution indispensable, puisque ces techniques physiques, essentiellement de neuromodulation transcrânienne, sont de plus en plus utilisées mais les plus récentes d’entre elles (stimulation magnétique transcrânienne répétée [rTMS] et stimulation transcrânienne par courant électrique continu de faible intensité [tDCS]) ne sont pas encore reconnues par la nomenclature et donc non remboursées », souligne-t-il.

La plus ancienne de ces techniques, l’électroconvulsivothérapie (ECT), reste d’actualité, avec de bons résultats dans la dépression sévère. Les indications sont bien connues et des recommandations permettent une délivrance de ce traitement dans de bonnes conditions d’efficacité et de sécurité. Mais l’ECT souffre d’une inégalité d’accès sur le territoire et d’une forme de stigmatisation, qui en limitent le recours pour certains patients.

Une technique validée dans la dépression

De développement plus récent, la rTMS a connu un essor important, depuis ses premières applications en psychiatrie au début des années 1990. La multiplication des études a dans un premier temps permis d’en préciser les paramètres d’utilisation pour optimiser le rapport sécurité/efficacité. Cette technique est validée et remboursée aux États-Unis depuis 2008 dans la dépression après échec d’un traitement antidépresseur. En France, les premières recommandations d’experts publiées en 2011 lui ont également accordé une place importante (rang A) dans la dépression, mais elle n’est pas remboursée. « L’étude multicentrique réalisée il y a quelques années dans le cadre de notre réseau chez des patients avec un niveau de résistance significatif aux antidépresseurs (échec après 2,5 traitements en moyenne), bien que manquant de puissance, a montré l’équivalence de la rTMS et des médicaments », rapporte le Pr Poulet, avant de préciser le profil de patients pouvant bénéficier de cette technique : surtout après échec de deux antidépresseurs, mais pas dans les formes délirantes – où l’ECT est plus efficace. « Le traitement vise la rémission ou l’amélioration maximale possible. Il se fonde sur des séances quotidiennes (5 par semaine) d’une durée de 20 à 45 mn », poursuit le Pr Poulet. Il faut compter de 10 à 30 séances, soit de 2 à 6 semaines de traitement, qui peut être réalisé en ambulatoire ou en hospitalisation.

La réponse est de 50 à 70 %, comparable à celle rapportée avec les antidépresseurs, au prix de moins d’effets secondaires. « Pourtant, ce traitement n’est pas reconnu par les autorités, ce qui est une perte de chance pour les patients, estime le Pr Poulet. Une étude médico-économique est en cours, coordonnée à Nantes par le Dr Samuel Bulteau, mais ses résultats ne seront pas connus avant plusieurs années ».

Les modalités du traitement de prévention de rechutes restent à mieux préciser : antidépresseur, psychothérapie ou rTMS de maintenance. Les recommandations européennes sur la rTMS, qui dataient de 2014, viennent d’être mises à jour.

Vers davantage d’ambulatoire ?

Autre technique de neuromodulation en cours d’évaluation : la stimulation transcrânienne par courant continu (tDCS), qui connaît un fort engouement en raison de son côté plus pratique (portable, elle pourrait même être réalisée à domicile), de son caractère moins onéreux et de sa très bonne tolérance. « Mais les preuves scientifiques doivent encore être étoffées, souligne le Pr Poulet. Il faut rester très prudent pour éviter une utilisation anarchique, qui pourrait décrédibiliser cette technique, très prometteuse en psychiatrie. Une étude médico-économique multicentrique est également en cours sur le territoire, coordonnée par la Pr Anne Sauvaget du CHU de Nantes. Elle vise à établir la place de la tDCS dans le traitement des épisodes dépressifs caractérisés après échec d’une ligne d’antidépresseur ».

Entretien avec le Pr Emmanuel Poulet, CHU de Lyon

Dr Isabelle Hoppenot
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Source : Le Quotidien du médecin