Exacerbations aiguës de FPI : ce qu’il ne faut plus faire

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Publié le 01/10/2021
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L’exacerbation aiguë de fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) a un pronostic très défavorable. Des progrès sont donc indispensables dans la prévention et le traitement. L’étude ExaFIP vient de montrer que le cyclophosphamide ne devait plus être utilisé.
Faute de preuves, les pratiques sont très hétérogènes

Faute de preuves, les pratiques sont très hétérogènes
Crédit photo : phanie

Les exacerbations aiguës de FPI sont des évènements graves, survenant de façon imprévisible. « Leur fréquence varie selon les études de 5 à 10 % par an, malgré un traitement antifibrosant. Le pronostic est sombre, le taux de mortalité étant de 50 %. Un facteur déclenchant doit être recherché (infection…). Le risque d’exacerbation aiguë est plus prononcé lorsque la FPI est évoluée », a expliqué le Pr Vincent Cottin (CHU de Lyon).

Une exacerbation aiguë (EA) doit être envisagée en cas d’aggravation récente de la dyspnée, non liée à une cause extraparenchymateuse, associée à de nouvelles opacités en verre dépoli et éventuellement des condensations à l’imagerie, non totalement expliquée par une insuffisance cardiaque ou une surcharge hydrosodée. Un angioscanner est indispensable pour éliminer une embolie pulmonaire. D’autres examens complémentaires sont utiles (1).

Une prévention attentive

La prévention repose avant tout sur une bonne prise en charge de la FPI. Parmi les principales mesures générales : la vaccination contre la grippe, contre le pneumocoque et le SARS-CoV-2. « L’éducation du patient est très importante. Il faut diminuer le risque d’infections, diminuer l’exposition à la pollution et éviter les corticoïdes », a ajouté le Pr Cottin. La réhabilitation respiratoire peut être indiquée. Les médicaments antifibrosants, pirfénidone et nintédanib, ont fait la preuve de leur efficacité. Ils ralentissent l’aggravation de la maladie, diminuent le risque d’exacerbation aiguë de fibrose et améliorent la survie. « Mais des exacerbations peuvent toujours survenir… », souligne le pneumologue.

Le nintédanib est indiqué dans le traitement des pneumopathies interstitielles diffuses (PID) fibrosantes chroniques avec un phénotype progressif (2) : il réduit les exacerbations aiguës (HR = 0,67 ; IC95 [0,46-0,98] ; p = 0,04). Une récente métaanalyse (12 956 patients dans 26 études) montre que les antifibrosants sont associés à une diminution du risque de mortalité toutes causes confondues (3) : RR = 0,55 ; IC95 [0,45-0,66] ; ainsi qu’à une diminution du risque d’EA : RR = 0,63 ; IC95 [0,53-0,76].

Une prise en charge encore non codifiée

La prise en charge de l’EA n’est pas codifiée, en l’absence de cause traitable (infection, embolie pulmonaire, insuffisance cardiaque). Une corticothérapie à forte dose (méthylprednisolone IV 10 mg/kg/j pendant 3 jours puis prednisone à dose décroissante) est le plus souvent prescrite sous couvert d’une antibiothérapie probabiliste à large spectre. Une héparine de bas poids moléculaire à doses prophylactiques est administrée pendant la durée de l’hospitalisation. « Le bénéfice des corticoïdes reste encore incertain : les études sont contradictoires, ce qui fait qu’on observe une grande hétérogénéité dans les pratiques, faute de preuves…, a ajouté le Pr Cottin. Une étude est d’ailleurs en cours à ce sujet, ExaFIP-2. »

Par ailleurs, il a été montré des risques accrus de décès et d’hospitalisations chez les patients traités par une association de prednisone, azathioprine et N-acétylcystéine (4).

À l’heure actuelle, faute d’un traitement bien validé, des études sont donc nécessaires. C’est ainsi qu’a été réalisée l’étude ExaFIP, multicentrique (35 centres en France, 120 patients), dont l’objectif était d’évaluer l’intérêt du cyclophosphamide (600 mg/m²) par voie IV à J0, J15, J30 et J60 versus placebo, associé aux corticoïdes à très forte dose (10 mg/kg par voie IV pendant 3 jours, puis diminution progressive) en traitement des EA. Il a été observé une surmortalité à 3 mois dans le groupe cyclophosphamide ; 45 % vs 31 % dans le groupe placebo. Cette molécule ne doit donc plus être utilisée en traitement des EA (5).

Exergue : Faute de preuves, les pratiques sont très hétérogènes

Communication du Pr Vincent Cottin (Lyon), lors de la session conjointe ERS/SPLF

(1) HAS Fibrose pulmonaire idiopathique juillet 2021.

(2) Flaherly KR et al. Eur Respir J 2021 in press

(3) Petnak T et al. Chest 2021 in press

(4) Raghu G et al. N Engl J Med 2012 ; 366 :1968-72

(5) Naccache JM et al. Lancet Respir Med 2021 in press et RCT 2903

Dr Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin