Maladie de Paget

Traiter la douleur, pas le taux de phosphatases alcalines !

Publié le 07/12/2015
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Un nombre plus important de fractures sous traitement intensif

Un nombre plus important de fractures sous traitement intensif
Crédit photo : PHANIE

Cet essai clinique multicentrique a comparé deux stratégies : traitement « intensif » où les patients (n = 270)

recevaient de l’acide zolédronique tant que les PAL étaient élevées ou « à la demande » où les patients (n = 232) n’étaient traités que s’ils étaient douloureux. Comme attendu, les PAL étaient plus basses dans le groupe intensif mais aucune différence n’était observée pour les douleurs ou la qualité de vie. En outre, un nombre plus important de fractures est observé dans le groupe intensif (26 vs 13) : il en est de même pour les interventions orthopédiques (15 vs 8). Cette étude suggère que la décision de traitement sur la base des seules données biochimiques du remodelage osseux non seulement n’apporte pas de bénéfice sur les symptômes des patients, mais pourrait également être délétère en augmentant le risque de fractures ou interventions chirurgicales. Les auteurs concluent que, dans la maladie de Paget, il faut soigner la douleur des patients, et pas leur taux de phosphatases alcalines !

Hôpital Lariboisière, Paris

(1) Tan M. et al. Abstract 1 069

Commentaire du Pr Philippe Orcel*

Depuis l’avènement de bisphosphonates puissants, l’espoir était né de contrôler réellement l’évolution clinique de la maladie de Paget. Les molécules développées depuis le milieu des années quatre-vingt-dix (tiludronate, risédronate puis acide zolédronique) ont fait émerger le concept de mise en «rémission prolongée» sur la base d’un contrôle optimal des marqueurs biologiques du remodelage osseux, c’est-à-dire de l’activité osseuse de la maladie. On pouvait dès lors avoir l’ambition de prévenir certaines complications liées à l’hypertrophie ou à la déformation des os pagétiques. Les données de cette étude confirment l’absence de bénéfice de la stratégie intensive en terme de qualité de vie. Elles attirent en outre l’attention sur un risque réel de « surtraitement » des pagétiques : à vouloir trop bien faire en terme de contrôle biologique, le groupe intensif comporte un plus grand nombre de fractures et d’interventions orthopédiques et même une ostéonécrose de mâchoire. Ces données incitent fortement à ne traiter que les manifestations douloureuses pagétiques, ce qui est habituellement très simple avec un traitement très intermittent qui n’expose sans doute pas aux risques osseux rapportés ici.

*Hôpital Lariboisière, Paris
Dr Thomas Funck Brentano

Source : Congrès spécialiste