Par Thierry Covol
Suivant les conseils de son ami Perry, Kacem met toute son énergie dans son travail afin d’obtenir une promotion.
Le jeune homme veille sur la disponibilité des infrastructures informatiques, l’approvisionnement des stocks de médicaments, kits de prélèvements et Méd-bots, ainsi que sur l’état des drones qui acheminent vers les patients les prescriptions des Méd-IA. Il s’applique tout autant dans la préparation des données transmises quotidiennement aux Analystes qui, comme Perry, travaillent au perfectionnement du Régime Bienveillant. À son niveau, Kacem est un rouage exemplaire du sain équilibre de la balance économico-sanitaire du pays.
Mais plus il s’implique, plus sa frustration grandit.
Contrairement aux recommandations de Perry, il continue de dévorer ces livres qu’il affectionne depuis toujours, où des médecins combattent la maladie au contact physique de leurs patients, quitte à mettre en danger leur propre vie. Si seulement il avait pu vivre à cette époque ! Des remarques telles que celle-ci, Kacem ne les partage plus avec son ami. Perry change, constate-t-il. Il ne jure plus que par le Régime, rejetant toute critique, même si elles concernent un obscur responsable de Centre Local comme Vallon. « Tu es tellement romantique », lui a-t-il dit un jour, comme s’il s’agissait de la pire des tares. « S’ils existaient, a-t-il ajouté, usant de cette légende urbaine que l’on sert aux enfants qui prennent leurs études à la légère, tu irais grossir les rangs des Illég ! »
Une nuit où il assure la permanence au Centre, Kacem entre dans le bureau de Vallon pour y déposer un cadeau reçu d’un fabricant de Méd-bots qui cherche à faire homologuer un nouveau modèle de nano-robot chirurgical testé par le Centre. C’est la première fois que Kacem se retrouve seul dans le bureau du Superviseur. Tout y est fonctionnel et impersonnel. Rien ne retient l’attention à part cette antique station de supervision reléguée dans un coin. Elle témoigne d’une époque où les MédSups intervenaient encore sur certains appels, avant que les Méd-IA soient déclarés infaillibles. Un morceau de papier dépasse sous le clavier de la station. Ce sont les identifiants de Vallon. Après tout, se dit Kacem en allumant la station, elle n’est sûrement plus connectée. Mais quand, après s’être identifié avec les codes du Superviseur, Kacem voit défiler sur l’écran les appels entrants du Centre, il en a le souffle coupé. Parmi les options qui s’offrent à lui, l’une d’elles lui propose de s’attribuer le prochain appel. Kacem hésite un instant puis, après avoir coiffé le casque-micro, il valide cette option. « Voulez-vous que l’appel soit enregistré ? » lui demande alors le système. « Non », s’empresse-t-il de répondre. « Bonjour », dit aussitôt une voix d’homme. Kacem sursaute. Un patient ! Une fiche monte à l’écran. Toutes les données du patient sont accessibles à partir de cette fiche. Son historique, son environnement, mais aussi ses constantes, relevées par son bracelet-capteur. Le cœur de Kacem s’emballe. « Bonjour » insiste le patient, attendant qu’un Méd-IA lui réponde. Kacem a suffisamment vu l’Intelligence Artificielle à l’œuvre pour être capable de l’imiter. Il inspire et dit : « Bonjour Max Sidoine. En quoi puis-je vous aider ? » Et, quelques minutes durant, Kacem écoute, questionne, examine les données à sa disposition, émet un diagnostic – une simple angine – et prescrit un traitement. Comme les médecins de ses livres, ou presque.
Avec la collaboration de

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