Un an après la découverte du SARS-CoV-2, les premiers vaccins sont déjà là grâce aux connaissances acquises en un temps record sur ce nouveau virus. Dans un document pédagogique ayant vocation à être régulièrement actualisé, la Haute Autorité de santé (HAS) dresse un état des lieux de la recherche vaccinale et des aspects immunologiques de l’infection Covid-19.
Le bénéfice recherché de la vaccination est double : il peut être individuel en limitant la sévérité de la maladie ou bien collectif en réduisant la transmission. « Les vaccins prochainement disponibles protègent des formes sévères de Covid et des décès », a précisé en conférence de presse la présidente de l'agence, la Pr Dominique Le Guludec. En revanche, avait-elle ajouté, « nous ne savons pas encore s'ils seront capables d'apporter un bénéfice collectif en limitant la transmission ».
Les vaccins en développement s'appuient sur huit plateformes technologiques : vaccins vivants atténués et vaccins inactivés, vaccins à base de sous-unités protéiques, vaccins à partir du matériel génétique viral (ARN et ADN), par vecteur viral réplicatif ou non réplicatif, et vaccins à pseudo-particules virales.
Rapides à produire, les vaccins ARN sont parmi les plus avancés, avec ceux de Pfizer/BioNTech et Moderna. Ils reposent sur des ARN messagers qui utilisent la machinerie cellulaire pour produire la protéine S virale et induire la réaction immunitaire. Comme ils ne pénètrent pas dans le noyau cellulaire, contrairement aux virus à ADN, ces vaccins présentent un « profil de sécurité optimal », selon la HAS.
Sur le plan fondamental, le mécanisme permettant au virus d'infecter les cellules est aujourd'hui bien connu. La protéase TMPRSS2 de l'hôte va cliver la protéine Spike (S), présente à la surface du virus, en deux sous-unités S1 et S2. La sous-unité S1 contient le domaine de liaison au récepteur (RBD). C'est par le biais de ce motif que le virus va pouvoir fixer le récepteur ACE2 de l'hôte. La sous-unité S2 va alors permettre la fusion entre la membrane de la cellule et l’enveloppe virale, et donc l'entrée du virus dans la cellule.
Comme pour le SARS-CoV-1 et le MERS-CoV, c'est la protéine Spike (S) présente à la surface du virus qui est la cible principale des anticorps neutralisants (voir encadré). Ainsi, la grande majorité des vaccins en cours de développement utilisent cette protéine (ou une partie) comme antigène.
Analyser réponses humorale et cellulaire
La réponse humorale à l'infection Covid se fait essentiellement via les IgA et les IgG. Mais il existe aussi une réponse cellulaire médiée par les lymphocytes T. « Une réponse lymphocytaire T à la fois CD4+ et CD8+ est aussi retrouvée chez les patients infectés. Elle est plus fréquente que la réponse anticorps, puisqu'elle est retrouvée également chez les patients asymptomatiques », écrit la HAS.
Dans le cadre des essais, la réponse anticorps est généralement évaluée quatre semaines après la vaccination à l'aide de tests sérologiques Elisa. Quant à la réponse cellulaire, elle est généralement évaluée deux semaines après la vaccination le plus souvent à l'aide d'un test appelé ELISPOT IFN-γ. À noter que ces tests ne sont pas standardisés au niveau international, ce qui rend les comparaisons difficiles d'une étude à l'autre.
La réponse immunitaire peut parfois être délétère, avec la survenue d'un phénomène appelé ADE (pour Antibody Dependant Enhancement) qui consiste à produire des anticorps facilitant l'entrée du virus dans les cellules. Observé avec d'autres coronavirus, ce phénomène n'a toutefois pas été retrouvé à ce jour au cours de l'infection par le SARS-CoV-2 ni au cours de la vaccination.
L'immunité muqueuse
Dans l'objectif de contrôler l'épidémie, l'immunité muqueuse est un point essentiel pour bloquer la transmission du virus. « Les principaux candidats vaccins contre le SARS-CoV-2 sont administrés par voie intramusculaire et ne peuvent induire efficacement la production des IgA sécrétoires au niveau des voies aériennes respiratoires supérieures (VARS). Dès lors, leur effet se portera a priori plus sur le blocage de la multiplication virale au niveau pulmonaire (sévérité de la maladie) qu’au niveau des VARS », est-il détaillé.
La HAS considère ainsi que les premiers vaccins disponibles ne seront peut-être pas les plus efficaces : « plusieurs équipes travaillent sur la conception de vaccins intégrant des antigènes plus divers afin notamment d’élargir la réponse lymphocytaire et (ou) du (des) vaccins à délivrance muqueuse qui pourrai(en)t s’avérer à terme plus pertinent(s) pour contrôler précocement l’infection virale ».
Des inconnues persistent
Malgré l'étendue des connaissances, un certain nombre de questions demeurent, en particulier concernant la durée de protection, l'efficacité des vaccins dans des populations spécifiques (personnes âgées, malades chroniques…), la pertinence et l'innocuité de vacciner des personnes ayant un antécédent de Covid et la capacité des vaccins à être efficaces avec une seule dose. La variabilité génétique du virus doit aussi être surveillée.
Dans le cadre de la plateforme INSERM Covireivac, trois essais vaccinaux vont être lancés d'ici à janvier 2021 et ont vocation à apporter des données complémentaires aux essais de phase 3.
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