Maladie auto-immune bulleuse grave, le pemphigus était mortel avant le recours aux corticoïdes. La démonstration de l'efficacité du rituximab, un anticorps anti-CD 20, tout d'abord dans les formes sévères puis plus récemment en première intention dans les formes modérées à sévères dans l'étude Ritux 3, est venue changer la donne. Dans cet essai prospectif multicentrique de phase 3, le rituximab a fait la démonstration de son intérêt, en association à des corticoïdes à doses rapidement décroissantes, comparativement au traitement standard par corticoïdes chez 90 patients ayant un pemphigus nouvellement diagnostiqué : le taux de rémission complète à 24 mois était de 89 % avec le rituximab versus 34 % avec le traitement classique, et les doses de corticoïdes trois fois moindres. L'incidence des effets secondaires a été réduite de moitié.
Pour prévenir les rechutes, un traitement d'entretien était prévu, avec une première injection à 12 mois. Au cours des 3 années de suivi, 24 % des patients ont rechuté, dans 73 % des cas avant la première perfusion d'entretien. Ce constat fait donc poser la question de la place éventuelle d'un traitement d'entretien plus précoce chez les patients les plus à risque de rechute. La comparaison, dans un travail récent, des paramètres cliniques et biologiques chez les rechuteurs et les non rechuteurs a permis de mettre en évidence deux critères associés à un risque de rechute précoce, de 50 % : une forme sévère au diagnostic (score PDAI initial ≥ 45) et la persistance de taux d'anticorps anti-Dsg au-dessus des valeurs seuils (anti-Dsg 1 ≥ 20 UI/ml ou anti-Dsg 3 ≥ 130 UI/ml à 3 mois). À l’inverse, en l'absence de ces deux critères, le taux de rechute est faible, inférieur à 5 %. Pour les auteurs de ce travail, l'indication d'une perfusion d'entretien de rituximab plus précoce (à 6 mois) pourrait être guidée par ces deux critères simples.
Un surcoût initial
Le coût élevé de cet anticorps peut constituer un frein à son remboursement et une étude a évalué les coûts du traitement de première ligne par le rituximab (toujours associé à la corticothérapie) comparativement à celui du traitement standard. Les auteurs ont pris en compte les coûts de santé directs (traitements, hospitalisations, consultations), y compris des rechutes, mais n'ont pas pris en compte les frais de transport ni les arrêts de travail. Sur cette base, ils montrent que le rituximab engendre certes un surcoût initial, mais qu'il est presque complètement contrebalancé par la réduction des rechutes et des effets indésirables.
Enfin, un dernier travail, présenté lors de la session « Bulles » du congrès, a rappelé s'il en était besoin la gravité du pemphigus et l'avancée apportée par le rituximab. Cette analyse rétrospective réalisée dans 13 services du groupe Bulles de la Société française de dermatologie a colligé les données des 249 cas incidents diagnostiqués entre 2004 et 2013. Il s'agissait dans 62 % des cas d'un pemphigus vulgaire (PV), dans 27 % des cas d'un pemphigus superficiel (PS), dans 5 % des cas d'un pemphigus paranéoplasique (PNP) et d'autres formes cliniques dans 6 % des cas. Dans cette étude, le taux de mortalité était assez élevé : 19 % pour le PV, 31 % pour le PS – pourtant classiquement considéré comme bénin – et 58 % pour le PNP. L'âge et la présence d'un cancer étaient deux facteurs de mauvais pronostic. Peu de patients ont bénéficié en première ligne d'un traitement par disulone ou rituximab, mais la mortalité était alors deux fois moindre qu'avec la prednisone seule ou associée à un immunosuppresseur.
Communications des Drs Claire Mignard, Vivien Hebert et Lamia Jelti (Rouen)
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