Prévenir tôt les maladies chroniques de l’adulte.

La fenêtre des « 1 000 premiers jours de la vie »

Publié le 17/11/2014
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Le concept des origines développementales de la santé et des maladies ou Developmental Origins of Health and Diseases (DOHaD) est né de l’observation des liens entre des perturbations de l’environnement pendant la petite enfance, la vie intra-utérine (voire une ou deux générations avant) et la santé de l’enfant devenu adulte ou de sa descendance…

Trois principaux régulateurs épigénétiques de l’activation des gènes ont récemment été mis en évidence : variations de méthylation (typiquement, le gène s’éteint si l’ADN se charge en groupements méthyl et s’active s’il se décharge), modifications d’acétylation des histones (protéines autour desquelles s’enroulent les hélices d’ADN), micro-ARN non codants régulateurs. Ces mécanismes de régulation sont sous l’influence de l’environnement. Une fois acquis, ils peuvent persister des décennies,se transmettre à très long terme. Ces moyens d’adaptation de l’organisme à son milieu sont par nature modifiables.

«On sait depuis peu que les maladies environnementales ont une origine très précoce dans le développement de l’individu : les deux premières années, la vie intra-utérine, voire avant. Pendant cette période, l’organisme est extrêmement vulnérable et sensible. Il perçoit les variations mêmes minimes de l’environnement (état nutritionnel, conditions psychoaffectives, culturelles, climatiques, stress, toxiques notamment perturbateurs endocriniens), les enregistre et se programme pour y faire face (régulations biologiques et physiologiques, fonctionnement cardiovasculaire, métabolique etc.). Ces marques épigénétiques précoces ne modifient pas les gènes, mais elles modulent leur niveau d’expression tout au long de la vie, pour s’adapter à l’environnement. Des facteurs de risque de l’âge adulte pourront ensuite se greffer à ces trajectoires de développement tracées dès les frémissements de la vie », explique le Pr Umberto Simeoni. Avec son équipe, et celle du Dr M. Benahmed (INSERM, Nice), il s’intéresse aux aspects mécanistiques transversaux qui sous-tendent ce concept et à la recherche de biomarqueurs de risque, en particulier les microARN. Ces équipes étudient les conséquences cardiovasculaires à l’âge adulte des variations combinées de la nutrition et des toxiques de l’environnement (perturbateurs endocriniens).

Changer le paradigme de la prévention

Actuellement, la prévention est tournée surtout vers les adultes. Les progrès dans la compréhension du concept de DOHaD poussent à la réorienter vers les femmes enceintes, les nouveau-nés (favoriser l’allaitement maternel permet de contrer une « programmation » défavorable) et les futurs parents dans l’espoir de contribuer à prévenir et traiter les pandémies de maladies non transmissibles telles le diabète de type 2 et l’obésité. C’est la période des « 1 000 jours », de la conception à fin de la 2e année de l’enfant.

D’après un entretien avec le Pr Umberto Simeoni, centre hospitalier universitaire Vaudois, Lausanne

En savoir plus :

Société francophone de la DOHaD : www.sf-dohad.fr; www.thousanddays.org et un numéro Médecine et Science (sous presse) consacré à la DOHaD

Dr Sophie Parienté

Source : Bilan spécialistes