L’alcool devient la substance problématique chez les jeunes en France. « On assiste à une banalisation de la consommation, déclare le Dr Yann le Quéré, et on voit émerger de façon alarmante le phénomène d’alcoolisation ponctuelle importante (API) qui consiste en la consommation d’au moins 5 verres d’alcool en une occasion ».
D’après les résultats de l’étude Escapad 2011, l’usage régulier de cannabis est en baisse chez les jeunes de 17 ans, mais ceux du tabac et de l’alcool sont en hausse avec en particulier une augmentation notable des ivresses répétées et régulières aussi bien chez les filles que chez les garçons. En 2011, plus de la moitié des jeunes de 17 ans disent avoir bu au moins cinq verres en une même occasion au cours du mois écoulé. L’API, qui s’apparente au binge drinking anglo-saxon concerne plus de la moitié des jeunes et est plutôt le fait des garçons (près de 60 % ont déclaré un épisode dans le mois) que celui des filles (46 %), mais l’écart aurait tendance à se réduire.
Dans les soirées de binge drinking, le but n’est pas de faire la fête en buvant éventuellement mais de boire un maximum d’alcool dans un temps très court.
«À mon avis, souligne Y. le Quéré, les messages de prévention contre le tabagisme portent leurs fruits notamment chez les jeunes. Le tabac perd peu à peu son image subversive ou branchée. La notion est généralement acquise que fumer, c’est nocif, même chez les consommateurs. Concernant l’alcool, les campagnes de prévention sont rares, particulièrement à destination des plus jeunes, l’alcool est valorisé dans les publicités ». Un exemple : il suffit de taper sur google : « Heineken, James Bond », pour afficher Daniel Craig au lit avec une superbe brune et...une bière ! James Bond ne fume plus, il boit une Heineken.
Compte Facebook
« La loi Evin ne semble plus adaptée », continue Y. le Quéré. Celle-ci autorise la publicité des boissons alcooliques sur bon nombre de supports mais l’interdit depuis cinq ans sur les « services de communications en ligne », sous réserve qu’elle ne soit pas intrusive, et l’exclut sur les sites destinés à la jeunesse, dédiés au sport et/ou à l’activité physique. Que dire alors de la coupe d’Europe de rugby à XV, dénommée H Cup (H de Heineken) jusqu’en 2014 ? Que dire des marques d’alcool qui, contrairement à celles du tabac, ont leur compte Facebook ? Heineken bénéficient de plus de 600 000 « like » en France, la vodka Poliakov, plus de 66 000… « Les alcooliers orientent délibérément leurs publicités vers les jeunes qui représentent un marché émergent du point de vue des ventes d’alcool, insiste Y. le Quéré. Ignorent-ils que l’alcoolisme est la première cause des décès survenant chez les 15-34 ans (22 %) toutes causes confondues (coma, accident de la route, accidents traumatiques, suicide) (1) ».
D’après un entretien avec le Dr Yann le Quéré, psychiatre addictologue, hôpital de jour jeunes consommateurs, CHU Paul Brousse, Villejuif
(1) Guérin S. et al. Journal of Public Health, 4 mars 2013
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